بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين

Par la grâce de notre shaykh, sidi Mohamed Faouzi al Karkari (qu’Allah sanctifie son secret) qui nous enseigna ce que nous ignorions jusqu’à présent. Le cours suivant n’est pas issu d’une réflexion discursive mais provient d’une vision à l’état d’éveil qui s’est produite durant le dhikr du Nom Allah fait dans le dernier tiers de la nuit.

Nous demandons à Allah de bénir notre plume et de rendre accessible à tous la compréhension de ce cours.

La question que nous allons nous poser dans ce cours sera : « comment le secret est-il apparu ? ». Pour répondre à cela, il nous faut en premier lieu introduire deux expressions : le « Ana/moi » et le « Huwa/Lui ». Le « Huwa » renvoie dans notre voie aux Noms divins. En effet, l’ensemble des Noms divins se trouvent rassemblés dans le cercle de la Lettre Ha (ه). La valeur numérique de la lettre Ha est, selon la numération arabe, de 5. Ce nombre renvoie aux 5 piliers de l’Islam. Il est dans les secrets du Nom le propre de la servitude. Il se manifeste de la façon la plus complète dans le secret de la jonction. De façon opposée, le « Ana » est l’antre de la seigneurie, il est le secret de la scission.

Dans la prééternité, le Ana et le Huwa étaient confondus. Ils étaient comme les deux faces d’une même pièce. Cette Haqiqa prééternelle, qui contient l’ensemble des possibilités, voulut se faire connaitre. Il est rapporté dans un Hadith Qudsi que le Très-Haut dit : « j’étais un trésor caché et j’ai aimé à me faire connaître, j’ai donc crée la création et par moi, ils me connurent. » Pour se faire connaitre, il fallut faire apparaitre la dualité. Beaucoup, lorsqu’il s’agit d’expliquer la raison de la création et de l’apparition de la dualité, émettent l’idée que cette Haqiqa ne se connaissait pas elle-même, ce qui est faux.

De l’apparition du Secret

Il s’agit de l’Essence pure sans considération des Noms, des attributs et des qualités. Rien ne permet de cerner cette Haqiqa. Essayer de la décrire, serait semblable à décrire ce qui se trouve entre l’affirmation (Huwa) et la négation (Ana). Pourquoi le « Ana » constitue la négation ? Car dire « Ana / Je suis » revient à s’affirmer et à annuler toute chose. Pour que puisse apparaitre la dualité, permettant à cette Haqiqa de se faire connaitre, il fallut séparer (scissionner) le Ana du Huwa. Cette scission correspond, dans l’histoire de sayiduna Adam, à la création d’Eve. Adam était esprit pure.  Le Très-Haut dit : « « J’ai soufflé en lui de Mon esprit. » » [1] Le souffle d’Adam était à l’image même de l’Essence. En effet, le Nom Allah est indicateur de l’Essence et le Messager d’Allah dit : « Allah a créé Adam à son Image. » La création d’Eve correspond, comme nous l’avons dit, à l’apparition de la dualité. Comment est apparue la dualité ? La première scission (fasl) fut celui du « Ana » qui se sépara du « Huwa ». Le « Ana » est la négation, la négativité, autrement-dit, il s’agit du pôle féminin.

Cette première scission fit apparaitre les Noms divins symbolisés par le Nom ar-Rahman ainsi que les différentes lectures du Nom « Allah ». Sans l’apparition de la dualité, les lectures du Nom Allah n’auraient pu être cernée par l’intellect. Lorsque le disciple Karkari parle de « cinquième secret » ou de « premier secret », il est toujours soumis à la dualité, car le secret sans les lectures ne peut être saisi par l’Intellect. Pour rappel, le Nom ar-Rahman réunit en son sein l’ensemble des Noms divins. C’est le sens visé par Allah, lorsqu’Il dit : « Et parmi Ses signes Il a créé de vous, pour vous, des épouses pour que vous viviez en tranquillité avec elles et Il a mis entre vous de l’affection et une miséricorde (rahma). Il y a en cela des preuves pour des gens qui réfléchissent. » [2] L’affection renvoie donc aux lectures du Nom Allah établissant un lien entre le seigneur et le serviteur. La miséricorde (rahma) renvoie à l’apparition des Noms divins qui sont le support du monde physique. Ainsi, une fois le Ana séparé du Huwa, il exista une jonction (wasl) absolue entre sayiduna Adam et son Seigneur. Sayiduna Adam était fait de Lumière et son regard ne se détournait jamais de la vision de la Lumière. Il était absenté et plongé dans la contemplation de l’unicité divine (wahidiya). Si bien que lorsqu’Iblis lui proposa un royaume sans limite, il le suivit car il ne voyait que la jonction. Il mangea de l’arbre de la connaissance du bien et du mal. Cette arbre n’est autre que l’olivier béni, ni d’orient ni d’occident. Il s’agit de l’arbre faisant apparaitre le miroir de la jonction. Il s’agit de l’arbre de la seigneurie. Quiconque s’en rapproche, découvre le secret de la seigneurie. Lorsqu’Adam mangea à l’arbre interdit, il fit apparaitre un miroir manifestant la considération Jalaliya des Noms divins. Il sortit de l’état de jonction propre aux anges, celui de la servitude pour découvrir la seigneurie qui était sienne, la seigneurie qui lui était cachée.

Allâh dit : « Puis le Diable, afin de leur rendre visible ce qui leur était caché –  leurs nudités – leur chuchota, disant : « Votre Seigneur ne vous a interdit cet arbre que pour vous empêcher de devenir des Anges ou d’être immortels. » » [3]

Le Ana devint le miroir du Huwa et le Huwa devint le miroir du Ana. Le Ana devint la source du Huwa et le Huwa devint la source du Ana. Qu’est-ce que sayiduna Adam – paix sur lui – a bien pu manger de l’arbre béni ? Il mangea l’insouciance. C’est l’insouciance qui fit naitre le secret car elle est la part de ténèbres propre au Divin. Et si Allâh nous le permet, nous aborderons ce sujet dans un prochain cours. Que symbolise la nudité ? Qu’est ce qui lui était caché ? La nudité correspond à la réalité de la nafs, il découvrit que la nafs qui était sienne était l’alpha et l’omega, qu’elle était ce qu’elle est. Qu’il était lui. Lorsque la seigneurie de sa nafs se manifesta à lui, il dut la couvrir par le voile de servitude. Ce voile de la servitude, comme nous l’avons dit, se manifeste dans le cinquième secret, celui du « Huwa ». Lorsque Adam mangea de l’arbre béni, il affirma le « Ana » et se détacha du « Huwa ». Il découvrit que le Ana contenait en son sein le Huwa, car le Ana englobe tout. En effet, bien qu’il s’agisse de la parole d’Iblis, le Coran reste le Coran et chaque verset est un enseignement provenant directement d’Allah.

Allah dit : « Iblis dit : « Je (Ana) suis (est) meilleur que lui (Huwa). » » [4] En se détachant de l’image d’Iblis et de Adam, Allah nous révèle dans ce verset que le Ana seigneurial contient et est supérieur au Huwa de la servitude. Sayiduna Adam, lorsqu’il mangea à l’arbre, permit aux noms divins de se manifester dans leur totalité, réunissant les Noms de Jamal et de Jalal. Il fit apparaitre le monde physique que nous connaissons. N’oublie pas mon frère, ma sœur, que tu es ton propre Adam, tu es celui qui créé à chaque instant ce monde en affirmant le « Ana » égotique et en sortant de la servitude. Cependant, il découvrit le voile de la seigneurie et pour rétablir l’équilibre, il dut de nouveau couvrir cette nudité. Comme nous l’avons dit, le Ana est un pôle féminin, et il doit être couvert du voile de la servitude, c’est pourquoi en Islam, il est demandé aux femmes de se couvrir les cheveux. C’est aussi pourquoi la Ka’ba est couverte d’un rideau.

Pour couvrir sa nudité cachée, sa seigneurie, sayiduna Adam – paix sur lui – dut se réaliser dans la servitude. Après avoir affirmé le « Ana », il dut se réaliser dans le « Huwa ». Il tira de son Seigneur un mot, celui du Huwa. En ce sens Allah dit : « Puis Adam reçut de son Seigneur un mot (kalima), et Allah agréa son repentir car c’est Lui certes, l’Accueillant au repentir, le Miséricordieux. » [5]

Il revint à la servitude du Huwa. De même, le Prophète ﷺ lorsqu’il découvrit la seigneurie qui était sienne dans le Lotus de la proximité, descendit au cinquième ciel (celui du Huwa, du cinquième secret) pour apprendre la prière auprès de sayiduna Mussa – paix sur lui –. La prière est donc le voile de la servitude. En ce sens Allah dit : « Et pour celui qui aura craint la station de son seigneur, il y aura deux jardins. » [6] Pour celui qui aura couvert la seigneurie de sa nafs par le voile de la servitude, il aura accès aux jardins du Huwa (de la jonction) et aux jardins du Ana (de la scission).

Lorsque sayiduna Adam – paix sur lui – retrouva Eve après l’avoir recherché pendant des années, le Ana retrouva le Huwa dans un équilibre parfait. C’est cela qui se produit dans le cheminement, cela prend des années. Le cheminement consiste à enseigner à la nafs qui possède en elle tous les attributs de la seigneurie, les convenances de la servitude. Alors le secret d’Allah, le secret suprême se révéla aux mondes. Sayiduna Adam devint lui-même ce secret. Il devint le confluent des deux mers, la mer du Huwa et la mer du Ana.

Allah dit : « Moïse dit à son valet: « Je n’arrêterai pas avant d’avoir atteint le confluent des deux mers, dussé-je marcher de longues années. » » [7]

Le Ana et le Huwa furent de nouveau réuni comme ils l’étaient dans la prééternité, dans un équilibre parfait. Mais cette fois-ci, il devint le centre du cercle de la création symbolisée par le cercle à six branches, chaque branche correspondant à un des six jours de la création, il devint le roi d’un royaume sans limite. Il devint l’image de l’Essence au cœur même de l’existence. Toute la création se prosterna en sa direction et les sphères de l’existence se soumirent à son ordre. Il devint l’Insan al-Kamil.

Allah dit : « Soulayman dit : « Seigneur, pardonne-moi et fais-moi don d’un royaume tel que nul après moi n’aura de pareil. C’est Toi le grand Dispensateur. » » [8]

« Ana Huwa / Je suis Lui » est l’expression la plus proche de l’Essence. Et si nous étudions les valeurs numériques du Nom, nous découvrons que Huwa (waw+ha) a pour valeur numérique 11 et Ana (alif+noun+alif) a pour valeur 52. En additionnant les deux, nous obtenons 63, soit le nombre d’années qu’a vécu le Messager d’Allah ﷺ. Comme si sa vie n’était que l’expression duale de l’Essence divine.


Article rédigé par le disciple Jamil.


[1] Sourate al Hijr, verset 29
[2] Sourate les romains, verset 21
[3] Sourate 7, verset 20
[4] Sourate Sad, verset 36
[5] Sourate baqara, verset 37
[6] Sourate al rahman, Verset 46
[7] Sourate al kahf, verset 60
[8] Sourate Sad verset 35