بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين

Il faut bien comprendre une chose. Il nous est impossible de juger objectivement d’une chose en nous basant sur notre propre réflexion et notre logique, parce que notre intellect n’est pas neutre. Il est subjectif et soumis à notre environnement, à nos croyances héritées et à notre vision du cheminement spirituel. Refuser une chose que notre intellect n’accepte pas est un non-sens pour celui qui est en quête de son Seigneur. Au contraire, la bonne attitude à avoir c’est de comprendre que notre point de vue – qui est issu d’un cœur ténébreux et d’un intellect confiné – est perverti. Il est donc indispensable de l’abandonner totalement pour s’en remettre pleinement à Allah ﷻ et à Son Messager ﷺ.

C’est la raison pour laquelle nous soulignons encore une fois la très haute importance d’observer ce que notre Bien-aimé ﷺ a dit et fait, parce que le cheminement spirituel doit toujours se faire sur son exemple suprême. Les états intérieurs, les épreuves et l’expérience spirituelle dont il a témoigné doivent être goûtés et vécus par tous les cheminants.

Il n’est pas suffisant de simplement suivre sa sunna physique. C’est obligatoire mais très insuffisant, parce que suivre le corps du Prophète ﷺ sans suivre son cœur est une marque d’incomplétude manifeste, pour ne pas dire un signe d’hypocrisie et de perversion.

C’est ce que dit notre Imam Malik – qu’Allah lui fasse miséricorde – lorsqu’il dit : « Celui qui applique la loi sans tassawuf est un pervers (fasiq) [1]. » Ce qu’il faut comprendre ici, c’est que celui qui applique ce que le Messager d’Allah ﷺ a mis en pratique physiquement – à savoir la Loi divine – sans réaliser les sens profonds et la réalité intérieure de cette Loi est un pervers. La vérité ne se trouve pas uniquement dans le suivi physique du Prophète ﷺ. Ce suivi doit être en conformité avec l’Etoile mohammadienne qui brille dans le cœur. C’est cela la véritable sincérité et c’est cela la complétude dans la religion d’Allah.

Comme pour tous les fondements de la Voie d’Allah, la bay’a mène l’aspirant à évoluer sur les traces du Bien-aimé ﷺ jusqu’à devenir un exemple mohammadien dont le cœur sera une lanterne éclairant son Univers. C’est pourquoi nous disons que la vie du Prophète ﷺ est la boussole des cœurs, car elle permet au cheminant de se situer dans le cheminement spirituel en étant attentif à la conformité de ses états intérieurs et de ses expériences spirituelles avec celles du Bien-aimé ﷺ.

Pour savoir si la bay’a prise est conforme avec la sunna prophétique, il faut comparer notre expérience à celle de notre Prophète ﷺ. Dans sa vie, deux évènements nous rappellent la bay’a. Le premier d’entre eux fut une expérience extraordinaire qui se produisit alors qu’il n’était encore qu’un enfant vivant parmi la tribu de Bani Sa’d.

Sayduna Anas Ibn Malik rapporte : « Jibril est venu au Prophète ﷺ alors qu’il jouait avec les enfants, il l’a pris et a sorti son cœur duquel il a sorti un morceau de viande et a dit : « ceci est la part de shaytan te concernant. » Ensuite il a lavé le cœur dans un récipient d’or avec de l’eau de zamzam, la replié puis il l’a remis à sa place. Les enfants sont allés en courant vers sa mère et ont dit : « Certes Mohamed a été tué ! » Ils sont donc allés vers lui alors que sa couleur avait changé et Anas a dit : « Je voyais certes la trace de cette ouverture sur son torse [2]. » »

La seconde expérience se produisit lors de son ascension spirituelle. Sayduna Abu Dhar rapporte que le Prophète ﷺ a dit : « A la Mecque, mon plafond fut enlevé, l’Ange Jibril en descendit, ouvrit mon cœur, le lava avec l’eau de zamzam puis il apporta un récipient en or, rempli de sagesse et de foi (Lumière), le déversa dans ma poitrine, referma celle-ci, me saisit la main et me fit monter au ciel le plus bas [3]. »

Comme nous l’avons déjà dit, les étapes du cheminement spirituel du Prophète ﷺ ne doivent rien au hasard et ces deux récits ne font pas exception à la règle. S’ils nous sont parvenus, ce n’est pas pour les lire avec émerveillement et insouciance. Non, nous devons les lire en pleine conscience. Nous devons les lire par l’expérience spirituelle et la connaissance divine.

Comme tous les récits prophétiques, ces deux hadiths renvoient à l’une des étapes du cheminement spirituel, à savoir l’étape cruciale de l’engagement, de l’ouverture spirituelle et de la purification du cœur par le biais de la wassita (intermédiaire).

Nous remarquons ainsi plusieurs choses dans ces deux hadiths. Tout d’abord, on se rend compte de l’importance de l’intermédiaire – ici, l’Ange Jibril – dans le cheminement spirituel du Bien-aimé ﷺ. Quel est son rôle ? Il est de nettoyer et de purifier le cœur de Sayduna Mohamed, jusqu’à ce qu’il disparaisse dans la présence de son Seigneur.

Dans le premier hadith, Sayduna Jibril nettoya le cœur pour en extraire une part ténébreuse. Les enfants s’écrièrent « Mohamed est mort », et effectivement c’est là que sa nafs fut morte, s’absentant de lui-même par lui-même pour que ne demeure nul autre qu’Allah ﷻ. C’est l’un des objectifs principaux de la véritable bay’a : purifier le cœur du cheminant et éteindre sa nafs dans la Lumière divine jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus se détourner de la Face de son Seigneur.

Dans le second hadith, l’Ange Jibril répéta la même opération. Il nettoya et purifia le cœur mohammadien, puis il y déversa un récipient rempli de sagesse et de lumières avant de l’élever dans les hauteurs spirituelles. C’est l’une des finalités de la bay’a : illuminer le cœur de l’aspirant par la Lumière du Vrai ﷻ jusqu’à ce que les voiles se lèvent, laissant apparaître la réalité divine. Par cela, l’intermédiaire te mènera jusqu’à t’élever au premier ciel, porte d’entrée de la lecture du Nom Suprême « Allah », et tu pénétreras dans le sanctuaire sacré du Ha al-Hawiya (ه).


[1] Parole rapportée par plusieurs grands savants notamment par le muhadith Sidi Ahmad Zarruq, par le muhadith ‘Ali ibn Ahmad al-‘Adawi, par le Shaykh `Ali al-Qari al-Harawi et par d’autres encore.
[2] Muslim, Sahih.
[3] Al-Bukhari, Sahih. Muslim, Sahih.