أعوذ بالله من الشيطان الرجيم
بـسم الله الرحمن الرحيم
بـسم الله الرحمن الرحيم بـسم الله الرحمن الرحيم
بسم الله بسم الله
بسم الله
الله الله الله
ولا حول ولا قوة إلا بالله

Le nom du faqir (لم النفي)

Assise du Shaykh éducateur sidi Mohamed Faouzi al-Karkari (qu’Allah sanctifie son secret) à Oujda, le samedi 12 mai 2013 :

J’atteste qu’il n’y a pas d’autre divinité qu’Allah et que Mohamed est le Messager d’Allah. Allah ﷻ fit de cette parole le premier des piliers faisant parvenir à la connaissance divine et à Son agrément quiconque la réalise. Ce premier pilier est une attestation visuelle (shahada) et non pas une parole (qawl) car il est dit « j’atteste » et non « je dis ». La réalisation de cette parole est la vision du Seigneur ﷻ et du Messager d’Allah ﷺ. Allah ﷻ fit de ce premier pilier une jonction (wasl) pour tous ceux qui désirent atteindre Sa connaissance. Nous disons : « nous sommes tous pauvres (fuqara) et Allah est le très riche (al-Ghani) ». C’est la raison pour laquelle l’aspirant (mourid) fut appelé pauvre (faqir). Aucune parole n’est prononcée sans qu’elle ne soit enregistrée dans un livre. Un livre dont il nous faudra rendre compte le jour du jugement dernier. Sachant cela, l’Homme se doit de prendre garde à chacune des lettres sortant de sa bouche et ce avant même de les prononcer. Le « faqir » ne devient « faqir » à part entière que par le compagnonnage du shaykh [réalisé]. Le « faqir » doit donc s’accomplir dans chacune des lettres de ce nom. Il en va de même pour le shaykh. Celui qui ne se réalise pas dans les lettres du nom qui lui sont associés n’a aucune part dans la connaissance du Nommé. C’est dans ce sens que les gens d’Allah n’ont eu de cesse de nous rappeler que le nom de Majesté « Allah » est le Nom indicateur (dal) de l’Essence (al-Dhat). Il est impossible que le nom indicateur de l’Essence soit facile à prononcer et que la langue se prosterne et s’incline d’elle-même lors de sa prononciation. En d’autres mots, je dis : le nom « Allah » ne se sépare jamais du Nommé (musamah) et aucune langue créée ne peut prononcer ce nom par elle-même. Plutôt, c’est le Vrai (al Haqq) ﷻ qui invoque Son propre nom à travers la langue d’une créature. Tous les savants de la loi et les maîtres de la Voie on dit du nom « Allah » qu’il était indicateur de l’Essence (dhat).

Qui donc a le droit de se réaliser dans ce Nom ? Celui qui parvient à se réaliser dans les lettres composant ce Nom. Ainsi, lorsque nous parlons de « faqir », il est demandé au disciple d’être un véritable faqir (pauvre). La première lettre du mot faqir est la lettre arabe « fa/ف ». Cette lettre, selon la numération Abjad, possède la valeur numérique 80. Le disciple se doit donc de se réaliser dans le nombre 80 correspondant aux 80 voiles. Autrement dit, il lui est demandé de s’éteindre entièrement (fana kulli) dans les 40 voiles de la nafs basse (nafs soufliya) pour que lui apparaissent les 40 voiles élevés (‘olwi). Le messager d’Allah ﷺ reçut la rissala lorsqu’il eut atteint les quarante ans, preuve de la réalisation de son âme (nafs) par celle du Miséricordieux (ar-Rahman). Lorsqu’il eut atteint les quarante ans, il lui est apparu l’âme du Miséricordieux par le flux de la rissala, faisant de lui celui qui allait transmettre le Message, ne craignant nul autre qu’Allah ﷻ. T’es-tu, ô aspirant, réalisé dans les quarante voiles égotiques (nafsiya) et bas à travers les quarante voiles lumineux et élevés, confirmant ainsi ton entrée auprès du Vrai (a-Haqq) par l’extinction ?

De nos jours, la parole des soufis n’est devenue qu’une simple étude linguistique. Tous lisent des livres, tous écoutent les méthodes de la Voie mais personne ne les applique sauf celui qu’Allah ﷻ aura pris dans Sa Miséricorde. Que signifie donc « l’extinction » (al-fana) ? Les gens de l’extinction (ahlul fana) sont ceux pour qui le Nom du Vrai se dévoile avant la chose, après la chose et dans la chose. Tel est celui que l’on peut considérer comme « faqir » ! Le degré de « faqir » est un degré élevé dans le cheminement soufi. Il ne s’agit pas d’une simple parole que l’on prononce par la langue, faisant de telle ou telle personne un faqir ! De façon apparente, nous sommes tous des fuqara (pauvres) car nous ne possédons rien si ce n’est la miséricorde d’Allah ﷻ. Le faqir est celui qui est dépouillé (mutajarrid) de tout ce qu’il possède, il n’a rien si ce n’est la face du Vrai. Alors, où qu’il se tourne, il voit la Face d’Allah. Voilà le véritable faqir ! Prête bien attention à mes mots ! Avant que tu puisses prétendre être un faqir dans telle ou telle voie, il te faut te réaliser dans la lettre « Fa/ ف ». Et comment te réaliser dans cette lettre ? Je te réponds de la plus simple des manières : que lorsque tu vois une chose, tu y vois graver le nom du Vrai ﷻ. Et ce, parce que le hadith qudsi dit : « ni Ma Terre, ni Mon ciel ne purent me contenir si ce n’est le cœur de mon serviteur croyant (‘abdi mu’min). » Tout est étroit auprès d’Allah ﷻ sauf le cœur du serviteur croyant. Si ton cœur contenait vraiment le Vrai, tu ne prêterais pas la moindre existence aux choses et tu verrais Son Nom écrit en toute chose. Ainsi est le véritable faqir. Goûte donc ! Le faqir est entièrement pour Allah (lillah). « C’est à Allah que nous appartenons (lillah) et c’est vers Lui que nous retournons » [1] c’est-à-dire que plus rien ne subsiste de Lui si ce n’est la face du Vrai. Il te faut goûter à cette réalité dans ce bas-monde (douniya) avant que tu ne le fasses bon gré mal gré dans l’au-delà (akhira). C’est cela la vraie réunion (jam’ haqiqi) faisant de toi un véritable faqir.

Puis vient la seconde lettre : le « qaf/ق. » Selon la numération arabe, la valeur associée à cette lettre est le nombre 100. Cette lettre fut appelée par les gens d’Allah (ahlul Allah) : « jabal qaf/ la montagne de qaf. » Car si Allah ﷻ se dévoilait à la montagne de qaf, il se produirait ce qu’il s’est produit pour sayiduna Moussa, lorsqu’il tomba foudroyé et disparut dans la contemplation de la Lumière du Vrai ﷻ. Un foudroiement si intense qu’il ne subsista que la face d’Allah ﷻ, ceci parce qu’il goûta à la proximité à travers la lettre « qaf/ق ». T’es-tu, ô faqir, éteint et as-tu manifesté le nom goûtant ainsi à la proximité (qurb) par la Lumière du Vrai ﷻ ? De nos jours, la montagne de Tur est encore visible mais lorsque le Seigneur s’est manifesté (tajjala) à la montagne, elle perdit toute localisation (makan), elle fut pulvérisée et sayiduna Moussa (‘alayhi salam) avec.

Ensuite, vient la troisième lettre : le « ya’/ي » qui a pour valeur numérique 10. Comme nous l’avons dit, le « fa/ ف » correspond au fana (extinction), le « qaf/ق » correspond à la proximité (qurb) obtenue par ceux qui ont à la fois la vue intérieur (bassira) et la vue sensorielle (bassira). Quant au « ya’/ ي », il correspond à la certitude (yaqin) totale dans la voie. Et dans quel cas sait-on que le faqir à une certitude totale dans la voie ? S’il voit le Nom « Allah » en toute chose, avant toute chose et après toute chose alors il tirera sa preuve sur les créatures par le Créateur. Il est donc dans une descente car il est perpétuellement avec Allah ﷻ. Mais de nos jours, le faqir est un simulateur (moumathil) ! Tu le vois s’asseoir à tes côtés, faire semblant d’être ravi (jadhb) et tu l’entends dire : « je suis ravi auprès du Vrai. » Tu l’entends dire : « tu es masha Allah, ton épouse est une sainte pieuse, ton fils est un homme pieux », et il ne cesse de flatter telle ou telle personne, n’ayant qu’un seul et unique désir : celui d’amasser le maximum de biens (al-mal). Voilà le « faqir » de l’an 2013. Essaie de me démentir, visite donc les zawiyas ! Le véritable « majdub » ravi dans la présence du Vrai est celui qui a été entièrement ravi de sa propre personne et qui s’est alors absenté de la création. Ce n’est pas celui qui dévoile les pensées intérieures des créatures. Les pensées intérieures sont couvertes par le Miséricordieux de telle sorte que la créature n’a point le droit de les dévoiler quand bien même ce serait le Miséricordieux Lui-même qui les montrerait. Apprend donc les convenances (adab) avec le Créateur ! Et l’Homme ne peut apprendre les convenances avec le Créateur qu’après les avoir apprises (appliquées) avec les créatures. S’il n’a pas de convenance avec la créature, il n’en aura aucune avec le Créateur. Le Prophète   a dit : « Celui qui ne remercie pas les gens, ne remercie pas Allah. » [2]

Enfin, vient la dernière lettre, le « ra/ر » renvoyant à l’agrément (ridha) complet du décret divin qu’il soit bon ou mauvais. Et la valeur numérique associée à la lettre « ra/ر » est 200. Si nous additionnons les valeurs numériques associées aux lettres « fa/ ف », « qaf/ق » et « ya’/ ي », nous obtenons 80+20+100= 200. Nous avons donc 200 qui s’obtiennent par l’effort (al-mujahada) et 200 correspondant au « ra/ر » qui provient de l’agrément du Miséricordieux. Ainsi, la balance se trouve dans un équilibre parfait, te faisant entrer parmi les gens d’al-‘Araf. Dès lors, tu n’appartiens plus exclusivement aux gens de l’effort ni aux gens de la miséricorde, tu fais plutôt parti de ceux qui contemplent la Face d’Allah. Quant à ceux qui se tournent vers la droite puis vers la gauche, qu’ils sachent qu’il fut dit au sujet d’al-Mustafa ﷺ : « la vue n’a nullement dévié. » [3] Ta vue ne doit donc plus dévier dans la contemplation d’Allah ﷻ. De nos jours, tous les soufis, tous les groupes, prétendent à cela alors qu’ils se sont éloignés des fondements et des degrés établis par les gens d’Allah, suivant plutôt leur passion (hawa) et cela tout en prétendant à l’élévation de l’âme alors qu’ils n’y ont aucun droit.

Comment reconnaitre le shaykh ? Le shaykh n’est ni une image, ni un titre, ni un diplôme que l’on montre à tous. Le « faqir », comme nous l’avons dit, est celui qui se réalise dans les lettres du mot le nommant. Il en va de même pour le shaykh. La première lettre du mot shaykh est la lettre « shin/ ش » acrostiche du mot sharaba (boire). Et que signifie « boire » ? Après qu’il te soit dévoilé la coupe contenant le vin, il te faut goûter à ce que contient la coupe. Et que signifie « goûter » ? C’est que tu saches avec précision ce que tu viens de boire. S’agit-il de l’eau, de miel ou autre chose ? Quant au shaykh, quelle liqueur doit-il boire ? Il s’agit de la même liqueur dont s’est abreuvé le messager d’Allah auprès de sayiduna Jibril durant le voyage nocturne (m’iraj) : le lait. Il lui fut proposé trois récipients contenant respectivement du vin, de l’eau et du lait et il choisit le lait ce qui fut associé à la science (al-‘ilm). De même, il est rapporté dans le Sahih Bukhari que lorsque le Messager d’Allah dormait – et le sommeil des Messagers n’est pas le sommeil des gens communs – il se vit boire du lait et il donna de ce qu’il en restait à Omar. Le lendemain, lorsqu’il ﷺ fit part de ce rêve aux compagnons qui lui demandèrent comment il l’avait interprété. Il dit : « Par la Science. » Le shaykh est donc celui qui a goûté au breuvage de la science (dhawq al ‘ilm).

Ensuite, la seconde lettre du mot est la lettre « ya’/ي ». Parce qu’il a bu à la certitude (yaqin) offerte par la proximité et par le goût de la science. C’est ainsi que le shaykh a atteint la réalisation. Et qu’est ce qui fait de lui un réalisé ? La profondeur de la connaissance qu’il a du mim Mohammadien. Ainsi, le shaykh et le faqir se doivent de s’accompagner. Le faqir accompagnera le maître en vue d’apprendre au sein de l’école Mohammedienne et d’accéder à une voie du cœur de Ahmad vers Muhammad c’est-à-dire à un trésor élevé qui est une sunna légiférée (mouakada) traduite du point de vue de la science issue de la poignée de Lumière « j’ai pris une poignée de ma Lumière et je lui ai dit sois Muhammad ». Ainsi, le compagnonnage (suhba) doit être vu comme une école. Voilà ce que doivent comprendre les shouyoukh et les disciples d’aujourd’hui. On ne se réunit que pour le bien (al-khayr) et le meilleur bien n’est autre que la science (‘ilm).

Pour que tu sois certain de ton inexistence, reviens au premier sujet que nous avons évoqué, celui de la parole : « J’atteste qu’il n’y a pas d’autre divinité qu’Allah et que Mohamed est le Messager d’Allah. » Nous sommes, donc, la communauté de la shahada (attestation par la vision). C’est comme si le Seigneur Tout-Puissant te disait que le premier pilier de l’islam était de voir le Seigneur et le Messager du Seigneur, al-Mustafa ﷺ.

Par exemple, en ce moment même, je suis assis parmi vous. Lorsque vous sortirez de la zawiya, vous direz : « Nous avons vu (shahadna) ce shaykh venant de la ville d’al-‘Aroui. » Ceci veut dire que tu as vu de tes propres yeux telle personne. La vision (moushahada) consiste donc à voir par les yeux. De même, si tu te rends auprès d’un juge (qadi), il te demandera si tu étais présent sur les lieux du crime, avant d’accepter ton témoignage (shahada). Il ne te demandera pas « as-tu entendu… » mais il te demandera plutôt : « as-tu vu ?. » Ainsi, le premier des piliers te faisant entrer en Islam n’est autre que la vision (moushahada) de ton Seigneur et celle de Son Messager ﷺ. Si tu n’en es pas capable, alors dis seulement « je dis qu’il n’y a pas d’autre divinité qu’Allah et je dis que Mohamed est le Messager d’Allah » et ne dis pas « j’atteste » ! Tu témoignes contre toi par toi, matin et soir d’une chose que tu ne vois pas. Et pourquoi cela ? Parce que tu ne goûtes pas aux lettres composant cette sentence ni à ses différents degrés ni à sa proximité ni à son éloignement. Tu ne ressens même pas la lourdeur de cette phrase sur ta langue. Si tu avais véritablement goûté à cela, tu aurais recherché l’acte par la vision en lieu et place de ta prononciation quotidienne.

Parlons maintenant du second pilier : celui de la prière (salat) c’est-à-dire le lien (silat) entre le Seigneur et Son serviteur. Le Messager d’Allah ﷺ a dit concernant la prière : « Priez comme vous m’avez vu prier. » [4] C’est comme s’Il te disait : « vois-Moi durant chacune de tes prières pour que tu puisses tirer profit dans ta prière de Ma prière ». Lorsque tu pries, vois-tu al-Mustafa prier face à toi ou bien vois-tu uniquement le tapis de prière ? Que vaut donc notre shahada ? Que vaut donc notre prière ? Que vaut notre lien nous reliant à notre Seigneur ? Que vaut notre Zakat, au sujet de laquelle Allah ﷻ dit « N’as-tu pas vu ceux-là qui se déclarent purs ? Mais c’est Allâh qui purifie (yuzaki) qui Il veut […] » [5]

Allah nous a-t-Il purifié par le lien nous reliant à Lui et au Mustafa  ? Tu verras, qu’en vérité, nous sommes éloignés de l’islam alors que lorsqu’on nous entend parler, on prétend aux stations de l’Iman et de l’Ihsan tandis que nous n’avons même pas réalisé le premier degré de l’Islam. Par Allah, si tu sondes ta propre âme, tu verrais que tu n’es que dans l’imitation aveugle, éloigné de la ma’iya et des sens profonds (al-ma’ana). Celui qui désire goûter à ces sens profonds et atteindre la vision d’Allah, qu’il revienne à la sourate an-Nour dans laquelle Allah dit : « Allah est la Lumière des Cieux et de la Terre. » [6] Ainsi, le Nom de majesté Allah  fut directement suivi du Nom de l’attribut de Lumière an-Nour. L’Homme se doit donc de rechercher la vision de La Lumière. Si tu dis que ce n’est pas possible, sache qu’Allah ﷻ te répond lorsqu’Il donna un exemple de Sa Lumière en disant : « l’exemple de sa Lumière est une niche (mishkat) dans laquelle se trouve une lampe (misbah). » [7] Lorsque tu éteins la lampe de la pièce dans laquelle tu te trouves, vois-tu une Lampe briller de tout éclat dans ton cœur ? Non, bien évidemment.

Si tu désires connaître ton état vis-à-vis de ton Seigneur, il te suffit de fermer les yeux dans le dernier tiers de la nuit. Tu verras alors une obscurité (al-dhulma) opaque couvrir ton cœur. Le Messager d’Allah  a dit : « Les cœurs se rouillent comme se rouille le fer. » Un compagnon dit alors : « comment les polir ? », et le Prophète répondit : « par l’invocation d’Allah. » Que doit donc faire celui qui ne voit que l’obscurité ? Il doit s’astreindre au dhikr d’Allah jusqu’à ce que se manifeste à lui une Lumière dans le cœur. Et comment est cette Lumière ? Comme une Lampe (misbah) se trouvant dans un Cristal (zujaja) et ce cristal est semblable à un Astre (kawkib), tel est l’exemple qu’Allah te donne pour te faciliter la compréhension ! L’Astre de grand éclat (kawkib duriy) tire sa luminosité de la chaîne de transmission originelle (sanad al-assas), qui n’est autre que l’arbre. C’est-à-dire que cette Lumière vient d’untel qui a pris auprès d’untel, qui a pris auprès d’untel… etc. Nous sommes la communauté des chaines de transmission. C’est pourquoi nous considérons que celui qui prend la science du hadith de lui-même, c’est comme s’il n’avait rien pris. Il se doit donc de rechercher une chaine de transmission authentique pour être considérer comme savant. De même, s’il désire apprendre le Coran auprès d’un maître, il devra rechercher un maître possédant une chaîne de transmission authentique le reliant au Messager d’Allah ﷺ.

Cette chaine de transmission de la Lumière est l’olivier béni. Un olivier qui n’est pas concerné par les directions. Toutes les directions se sont réunies dans l’arbre devenant « Lumière sur Lumière, Allah ne guide vers Sa Lumière que ceux qu’Il veut. » [8]

Celui qu’Allah a guidé, vers quoi a-t-il été guidé ? Vers la vision des attributs de la Lumière (awsaf an-Nour). Voici donc la voie juste ! Si tu prétends être un faqir ou un mouqqadem, observe ce qui se trouve dans ton cœur ! Si tu n’y vois qu’obscurité, sache que le messager d’Allah a dit « Notre Seigneur descend chaque nuit vers le ciel de la vie d’ici-bas lorsqu’il reste le dernier tiers de la nuit alors il dit : Qui est-ce qui M’invoque que Je l’exauce ? Qui est-ce qui Me demande que Je lui donne ? Qui est-ce qui Me demande pardon que Je lui pardonne ? » [9]

Ainsi, la première leçon de l’école Mohammadienne est « l’istighfar » (la demande de pardon). Cette école ouvre ses portes dans le dernier tiers de la nuit, son maître n’est autre que le Seigneur Lui-même et l’intitulé du cours est « l’istighfar ». Interroge-toi ! Es-tu un étudiant auprès d’al-Mustafa  ? Ou bien as-tu pris un autre maître que lui ? Nous prétendons tous à l’amour du Messager d’Allah et nous disons tous : « je prends du Messager d’Allah ﷺ. » Sache que prendre du Messager d’Allah ﷺ ne se résume pas à se laisser pousser la barbe ou à porter un qamis court et dire « je suis sur la sunna d’al-Mustafa ﷺ. » Ceci n’est pas la sunna ! La sunna se suit dans l’ordre d’apparition et la première des sunnas est la retraite spirituelle (al-khalwa) ! Et le Messager d’Allah ﷺ s’est effectivement retiré dans la grotte de Hira. T’es-tu, toi aussi isolé seul, t’absentant de la création, et ce uniquement pour rechercher le Créateur (al-Khaliq) ? Non…

De nos jours, même celui qui mémorise le Coran, ne le fait qu’en vue d’obtenir un diplôme. Un diplôme qu’il accrochera sur un mur pour ensuite dire : « j’ai appris les sept lectures auprès de tel et tel shaykh. » Tu trouveras également certains parmi les prétendants fuqarah suivre une Voie uniquement parce qu’elle est connue dans le monde. Voilà ce qui, de nos jours, est considéré comme la science (al-‘ilm), de simples feuilles que l’on accroche aux murs. De même, la méthode d’éducation spirituelle propre au soufisme n’est devenue que parole et autorisation que l’on encadre.

Par Allah, l’Homme n’a pas d’autre choix que d’éprouver de la honte vis-à-vis de lui-même. Serons-nous enterrés avec nos diplômes lorsque la mort nous saisira ? Sache que lorsque le Messager d’Allah ﷺ s’en alla rejoindre L plus haut des compagnons (rafiq al a’la/Allah Lui-même), il ne nous a pas laissé de diplôme avec un cachet. Il dit : « Je vous ai laissé sur une voie blanche dont la nuit ne diffère pas du jour et dont nul ne s’éloignera sans périr. » [10]. Tu te dois donc d’être de ceux qui empruntent cette Voie blanche et non pas de ceux qui possèdent tel ou tel diplôme, de ceux qui possèdent un simple papier que leur aura légué un shaykh. Et si ce diplôme pouvait te sauver de la traversée du pont (as-sirat), pourquoi le Prophète ﷺ a-t-il dit, comme il est rapporté dans un hadith authentifié par al-Albani, que ceux qui constituent le premier groupe à entrer au Paradis auront le visage semblable à la pleine lune. On ne te demande pas d’avoir un diplôme. As-tu dans ton cœur une pleine lune (badr) ou une étoile ? Si c’est le cas, alors tu traverseras le pont et tu n’auras aucun compte à rendre. L’enfer te dira : « Traverse ô croyant ! Car ta Lumière éteint mon feu. » [11]. De même, lorsque des compagnons interrogèrent le Messager d’Allah ﷺ sur la vision du Seigneur le jour du jugement dernier, il leur répondit qu’ils le verront comme on voit le soleil lorsqu’il est à son zénith et comme on voit la pleine Lune par temps clair et serein. Réveille-toi ! Ce sont les paroles du messager d’Allah ﷺ ! Ne viens pas dire que je suis dans l’innovation lorsque je te donne cet exemple car c’est Al-Mustapha ﷺ lui-même qui le donne !

Vois-tu dans le dernier tiers de la nuit un soleil ou une lune ? Lorsque la nuit enveloppa sayiduna Ibrahim et qu’Allah ﷻ lui eut montré l’étoile et la Lune, qu’a-t-il vu ? Allah ﷻ dit : « Lorsqu’ensuite il observa le soleil levant » [12]. Il vit ce soleil au cœur de la nuit car s’il s’agissait du soleil du jour, alors le pécheur et le pieu auraient pu le voir. Mais le soleil de nuit qui ne connait pas de couchant ne peut être vu que par l’ami intime (khalil) d’Allah, celui dont l’attachement et l’amitié ne sont que par Lui. Quant à nous, notre amitié et notre attachement sont-ils vraiment par Allah ﷻ ?

Non… effectivement. Que ce soit dans les mosquées ou dans les zawiyas, notre amitié intime avec le divin ne se fait plus que pour le bas-monde (dounia). Tu vois, alors, l’Homme commercer au cœur même de la mosquée, tu le vois commercer alors qu’il enterre son frère musulman, telle est la réalité de notre amitié intime en cette époque (‘asr). En lieu et place de désirer la beauté physique, ainsi que toutes caractéristiques apparentes, purifie donc ton cœur par une eau n’ayant ni couleur, ni goût. Une eau qui le vivifiera, l’éloignant de l’insouciance (ghafla) et te permettant de voir par lui le Vrai (al-Haqq) ﷻ, t’évitant ainsi de percevoir les choses tout en étant insouciant de leur Créateur, ce qui, au jour du jugement dernier, constituera une preuve contre toi.

Viendra le jour où nous serons séparés de nos familles et de nos bien-aimés pour demeurer dans une pièce fermée et limitée à la taille de notre corps, alors nous chercherons le moindre acte fait durant notre vie et avec lequel nous pourrons rencontrer notre Seigneur. C’est cela que l’Homme doit rechercher ! Ne dis pas : « Je suis le fils d’untel… je suis de telle Tariqa » ! Recherche dans le miroir de ton cœur et vois ce qui y est gravé. Y vois-tu gravé l’orgueil (kibr) et la vanité (‘ujub) ou bien la sincérité pure (al-ikhlass) ? Allah ﷻ ne projette son regard que sur un cœur empli de crainte référentielle (taqwa), un cœur dont les anges sont incapables de voir ce qu’il contient, un cœur dont le démon (shaytan) est incapable de corrompre car il est une corde liant (habl wasli) Allah à Son serviteur. Puisse chacun d’entre vous, ne serait-ce que cette nuit, se lèver une heure avant le lever du soleil, s’asseoir en direction de la Qibla après avoir éteint la lampe et rechercher une lampe dans son cœur. Si tu ne vois pas la Lampe éternelle, alors sache que cette lampe [13] ne te sera d’aucune utilité et si elle en avait, son utilité ne serait limitée qu’au bas-monde (dounia), mais dans l’au-delà (akhira), elle ne te sera aucunement profitable.

Allah ﷻ a fait de ce bas-monde une école pour que l’on s’y éduque, et que l’on y apprenne la rectitude (istiqama). Au lieu de perdre ton temps à scruter l’intimité des gens en disant : « lui a fait ça, lui a fait ci », recherche ce qui se trouve dans ta propre intimité pour savoir qui tu es dans ta véritable origine. Le Seigneur ﷻ t’a donné une voie élevée (‘olwiya), Il t’a donné le khalifa (lieutenance) par les Noms divins mais, toi, tu as délaissé les noms et la science de l’extinction (‘ilm al-fana) pour te consacrer à devenir « docteur » ou professeur sans qu’il ne se trouve dans ton cœur le désir d’être un connaissant par Allah (‘arifan).

Ceux qui chantaient les poèmes écrits par les gens d’Allah le faisaient avec sincérité et parce qu’ils croyaient en leurs paroles. Car les gens d’Allah n’ont exalté Allah et son Messager ﷺ que par Amour pour Lui, et par cela, Allah les célébra à leur tour par nos langues. Tu entends alors dire « un chant darqawi, un chant ‘alawi ». Mais toi, qu’as-tu laissé derrière toi pour qu’il soit transmis de génération en génération ? Rien qui ne puisse être mentionné ! Mais Shushtari, lui, a laissé une aumône continue (sadaqa jariya) qui est chantée et scandée en tout lieu et ce malgré toi. Et si tu viens ici avec une autre intention que celle de l’adoration, tu chanteras ses paroles bon gré mal gré. Ceci parce qu’il a évoqué Allah avec sincérité et aujourd’hui c’est Allah qui l’évoque à travers la langue de ses serviteurs.

Evoquons-nous Allah sincèrement pour Sa face ou bien le faisons nous pour une autre raison ? Que chacun sonde sa propre âme ! Dans ce bas-monde et dans l’au-delà, les enfants, la richesse, les biens ne seront d’aucune utilité… seule ta sincérité dans la recherche de la Face te sera utile d’Allah.


[1] Sourate al-Baqara, verset 155.
[2] Hadith rapporté par al-Bayhaqi.
[3] Sourate al-Najm, verset 17.
[4] Hadith rapporté par l’Imam Bukhari dans son Sahih.
[5] Sourate al-Nissa, verset 50.
[6] Sourate al-Nour, verset 35.
[7] Sourate al-Nour, verset 35.
[8] Sourate al-Nour, verset 35.
[9] Hadith 145, Sahih Bukhari.
[10] Hadith rapporté par l’Imam Ahmad dans son musnad (16692).
[11] Hadith rapporté par Tabarani.
[12] Sourate al An’am, verset 78.
[13] Lampe par laquelle on éclaire une pièce.