بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين

Allâh ﷻ dit : « Ô enfants d’Adam ! Nous avons fait descendre sur vous un vêtement pour cacher vos nudités, ainsi que des parures. Mais le vêtement de la piété voilà qui est meilleur. » [Sourate al-A’râf, verset 26].

L’Imâm al-Baqaliy (rahimahuLlâh) dit dans son tafsîr : « Chaque groupe possède son vêtement particulier. Les Connaissant (‘arifoûn) se vêtissent du vêtement de la Connaissance, les Amoureux (mouhibboûn) se vêtissent du vêtement de l’Amour, les Nostalgiques (mouchtâqoûn) se vêtissent du vêtement de la Nostalgie divine, les Monothéistes (mouwahhidoûn) ayant réalisé le Tawhid se vêtissent du vêtement du Monothéisme, les Ascètes (zâhidoûn) se vêtissent du vêtement de l’ascèse, les Craignant d’Allâh (mouttaqoûn) se vêtissent du vêtement de la piété (Taqwa), les Saints (awliyâ’) se vêtissent du vêtement de la sainteté, les Prophètes se vêtissent du vêtement de la Prophétie, et enfin les Messagers se vêtissent du vêtement de ceux qui portent le Message… et pour chacun de ces vêtements il existe une partie cachée et une autre apparente. La partie cachée est embellie pour le regard du divin, tandis que la partie apparente est embellie pour être le support de la Loi divine (chari’a).

Dans chaque vêtement se trouve une part pour les hommes, mais dans le vêtement de la piété il n’y a absolument aucune part pour l’égo. Les vêtements du commun sont pour les gens du commun, tandis que les vêtements divins sont pour ceux qui se sont éteint en Allâh et se sont parés de Ses Attributs, et tout habit finit toujours par s’éteindre dans le vêtement divin…

C’est la raison pour laquelle le Messager d’Allâh ﷺ a fait allusion à son maqâm qui lui confère de se parer des Attributs d’Allâh et de se vêtir de Ses Lumières dans le Hadîth : « Celui qui m’a vu a certes vu le Vrai (al-Haqq). »

Les Mots « yourâwiy saw’âtakoum (qui cachent vos nudités) » veulent dire que dans la réalité des Lumières prééternelles vous êtes tous dévêtus, et que votre enveloppe charnelle le serait aussi si vous ne la couvriez pas. Il convient donc que vous couvriez votre enveloppe charnelle du vêtement prééternel, votre ignorance du vêtement de la Connaissance, et votre état de servitude de celui de la Seigneurie.

L’Imâm al-Wâsitiy (rahimahuLlâh) a dit que le mot saw’ah, qu’on traduit dans le verset précité par « nudité », veut dire en fait l’ignorance, et la plus belle des parures est le fait que le serviteur se vêtisse de la piété, car le vêtement de la piété est une protection garantie contre la ruse de tout jaloux. La Taqwa est l’habit du cœur et son signe est la vertu. La Taqwa c’est le adab, la bonne convenance vis-à-vis d’Allâh, qui consiste en le fait de ne rien voir en dehors d’Allâh sinon Allâh Lui-même.

Certains ont dit que le vêtement de la bonne guidée est pour les gens du commun, quant au vêtement de la piété il est destiné à l’élite. Le vêtement de la crainte (hayba) est pour les connaissants (‘ârifoûn), les vêtements raffinés sont pour les gens de ce bas-monde, les vêtements de la Rencontre et de la Vision sont pour les Saints, et les vêtements de la Présence divine (Hadra) sont pour les Prophètes. Al-Ustâdh a dit que le vêtement du cœur était le vêtement de la piété, qui désigne la sincérité de l’intention de la personne au travers de l’abandon total de tout désir mondain. Le vêtement de l’esprit est un vêtement de sacralité (taqdîs), qui consiste en le fait de délaisser et d’effacer toute chose nous liant à ce bas-monde. Le vêtement du Secret (sirr) est quant à lui un vêtement fait de piété (libâs min al-Taqwa) qui consiste en le fait de renier toute cohabitation et toute existence en dehors d’Allâh, et de sans cesse se rappeler de Lui. »

[Tafsîr ‘arâ’is al-bayân fi haqa’iq il-Qur’ân, de l’Imâm al-Baqaliy]

Vois donc de quel vêtement tu désires te parer, selon ton Aspiration divine, selon ton Amour du divin, selon ton Rapprochement de Lui… et gare à toi de prêter une quelconque attention aux gens du commun : la satisfaction des créatures est une chose inaccessible, préfère donc ce qui est durable à ce qui est voué à disparaître, préfère la Vérité à ce qui est faux. La mouraqqa’a est l’héritage de notre père Âdam (‘alayhi s-salâm), elle est la base et l’origine de tout vêtement, elle est le premier vêtement qu’il porta. Sayidunâ Ahmad ibn ‘Ajîba (qaddassAllâhu sirrahu) a dit dans son tafsir du verset suivant : « Puis, lorsqu’ils eurent goûté de l’arbre, leurs nudités leur devinrent visibles; et ils commencèrent tous deux à y attacher des feuilles du Paradis. » [s7.v22] ils joignaient et assemblaient des feuilles les unes sur les autres afin de s’en couvrir. Il fut dit qu’il s’agissait de feuilles de figuier. Âdam (‘alayhi s-salâm) est donc le premier homme à s’être vêtu d’une mouraqqa’a. » [tafsîr al-Bahr al-Madîd fi tafsîr il-Qur’ân il-Majîd]

Par ailleurs la mouraqqa’a éloigne celui qui la porte d’endroits ou de choses provoquant la colère du Seigneur, elle est au cheminant ce que sont l’ardeur et l’enthousiasme au malade recherchant la guérison. Elle empêche celui qui la porte d’entrer dans des endroits où l’on s’adonne à ses passions et où l’on se complait dans l’insouciance, ainsi que de participer à des assises où l’on parle de choses futiles. La mouraqqa’a est l’emblème du suivi du chemin bon, et selon ‘AbdAllâh ibn Sarjas al-Mazaniy, le Prophète ﷺ a dit : « Le chemin bon, la continence et la bonne orientation constituent une des vingt-quatre parties de la Prophétie ». [Jâmi’ at-Tirmidhiy, 1930].

Le chemin bon peut avoir ici un grand nombre de sens différents, et parmi ces sens le fait qu’il soit pour toi une manière de ressembler et de t’affilier aux gens du bien et aux pieux… quel honneur plus grand que celui de servir une partie d’entre les vingt-quatre constituant la prophétie, d’être ainsi relié à une partie de la parole bénie du Tawhîd, d’être affilié à l’une des lettres de « lâ ilâha illa Allâh, Muhammadun rassoûlu Llâh », qui est bien composée de vingt-quatre lettres. Le Messager d’Allâh ﷺ s’est paré de toutes les couleurs, applique et réunis donc sur toi la Sunna du Bien-Aimé. O toi qui désires sa compagnie, il ne viendra à toi que par toi, lève-toi donc et marche vers lui. Cesse de tergiverser.

Ibn ‘Ata’iLlâh al-Iskandariy (radiAllâhu ‘anhu) dit dans ses Hikam : « Si tu ne pouvais parvenir à Lui qu’après l’anéantissement de tes péchés et l’effacement de tes souhaits, tu ne L’atteindrais jamais. S’Il veut te faire parvenir à Lui, Il couvrira tes caractéristiques par les Siennes, et tes traits par les Siens, de manière à ce que ton arrivée à Lui soit non pas de toi vers Lui, mais de Lui vers Lui. »

Couvre donc tes attributs par les Siens, couvre ton ignorance par Sa Connaissance, couvre ton avilissement par Son Honneur et Sa Grandeur, et l’absence de ton existence par Son Existence. Couvre tes ténèbres par la Lumière de Ses Attributs, manifestée au travers des couleurs qui composent la mouraqqa’a, tu accèderas ainsi à Sa Proximité et tu atteindras Sa Satisfaction.


Source : Les fondements de la Tariqa Karkariya, Shaykh Mohamed Faouzi Al Karkari, éditions Les 7 Lectures.