بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين

Tafsîr de l’Imâm Ahmad ibn ‘Ajîba [S22.V46]

« Car ce ne sont pas les yeux qui s’aveuglent, mais, ce sont les cœurs dans les poitrines qui s’aveuglent. » [s22.v46].

L’aveuglement des cœurs désigne l’éteignement de la vision intérieure (basîra). Les signes de cet éteignement sont multiples :

  • Le fait d’occuper ses membres dans la désobéissance à Allâh,
  • Le fait de se laisser absorber par l’insouciance et l’absence du rappel d’Allâh,
  • Colporter des ragots au sujet des Awliya d’Allâh,
  • S’évertuer dans la quête de ce bas-monde tout en négligeant ce que Allâh attend de nous. Et dans les Hikam : « Le fait que tu t’évertues à rechercher ce que Allâh t’a garanti, et que tu négliges ce qu’Il attend de toi, et la preuve de l’éteignement de ta vision intérieure (basîra) ».

 

Quant aux signes de son ouverture :

  • L’empressement dans l’obéissance aux Ordres d’Allâh,
  • Agir et travailler dans et par la Connaissance d’Allâh,
  • Rechercher la compagnie des Awliya’ d’Allâh,
  • Le renoncement à ce bas-monde et à ses gens, la recherche de l’intimité avec Allâh et l’oubli de tout autre que Lui.

 

Sache par ailleurs que la vision des yeux (basar) et celle des cœurs (basîra) sont toutes deux liées. Les yeux ne perçoivent que les choses physiques, matérielles et créées ; tandis que le cœur ne perçoit que les sens profonds, prééternels et incréés. Par conséquent, si la vision du cœur s’éteint, le serviteur se voit séparé d’Allâh et ne perçoit plus que les mondes créés et ténébreux. En ce sens, sidi Abderrahmân al-Majdhoûb (radiAllâhu ‘anhu) dit dans un poème :

Celui qui regardera le monde par le monde, celui dernier le trompera via l’aveuglement de sa vision intérieure (basîra),
Quant à celui qui verra le monde par son Créateur, celui-là aura véritablement bénéficié du remède du Secret.

Et si la vision intérieure (basîra) s’ouvre toute entière, alors sa Lumière vient se superposer à la lumière perçue par les yeux, et cette lumière des yeux se voit remplacée par celle du cœur. Le serviteur ne voit alors plus que les Secrets des sens profonds prééternels, exempts de toute considération spatio-temporelle créée, et la contemplation du Créateur le détourne de toute vision et perception de la créature. Ce remède permettant l’ouverture totale de la basîra ne peut être administré que par la main d’un médecin expert, un Connaissant par Allâh, qui fera apparaître cette étincelle par le Tawhîd. [L’aspirant] n’aura ainsi donc de cesse de se soigner, tout d’abord par la réalisation du Tawhîd des actions, puis du Tawhîd des attributs, et enfin du Tawhîd de l’essence, jusqu’à ce que l’ouverture ait lieu. Le Tawhîd des actions et des attributs lui feront constater de la Proximité du Vrai par rapport à Son serviteur. Quant au Tawhîd de l’essence, il le mènera à la constatation de l’absence de son existence et à l’établissement de celle du Vrai. C’est en ce sens qu’il est dit dans les Hikam : « Les rayonnements de la vision intérieure (chu’a’ al-basîra) te permettent de constater la Proximité du Vrai par rapport à toi. La véritable vision (‘ayn al-basîra) intérieure te permet de constater que tu n’es que néant face à Son Existence. Quant à la vision intérieure exclusive (Haqq al-basîra) elle te fait constater l’Existence du Vrai uniquement, sans considération ni de ton existence, ni de ta non-existence : « Allâh était tandis que rien n’était avec Lui, et Il est aujourd’hui tel qu’Il a toujours été. » ». Alors, [l’aspirant] verra des Secrets émanant de l’Essence ainsi que des Lumières des Attributs ce que les gens qui regardent ne voient pas, et il contemplera ce que les ignorant ne percevront pas.

En ce sens, al-Hallâj dit sous forme de vers :

Les cœurs des Connaissants ont des yeux
qui voient ce que ne voient pas ceux qui regardent

Et des ailes qui les font voler, sans plumes
vers le malakoûte du Seigneur des univers

Et des langues implorant par les Secrets
par des formules qui échappent aux anges chargés d’écrire.

Et al-Wartajâbiy dit : Les ignorants voient les choses selon une perception physique apparente, et leurs cœurs sont voilés des réalités ésotériques de ces choses… choses desquelles pourtant rayonnent les Lumières de l’Essence et des Attributs divins. Allâh les a aveuglé par les voiles de l’insouciance et des passions.