بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين
Comment transcender les limites de ton âme?
Allâh –subhânahu wa ta’ala– dit : « Ô peuple de djinns et d’hommes ! Si vous pouvez sortir du domaine des cieux et de la terre, alors faites-le. Mais vous ne pourrez en sortir excepté à l’aide d’un pouvoir (Sultân). » [s55.v34] L’univers qui est notre univers, ne se trouve nulle part d’autre qu’en nous même, cerné par les limites de notre propre nafs. Et dans ce verset, le Vrai –‘azza wa jall– nous demande de sortir des limites des cieux et de la terre de notre nafs, afin d’accéder aux cieux et à la terre de l’esprit. Or ceci n’est possible qu’à l’aide d’un pouvoir (Sultân).
Penchons-nous donc sur la question de savoir quelle est la nature de ce Sultân :
Selon sayidina Makkiy ibn Abiy Tâlib, dans ce verset Sultân veut dire une preuve (bayyina) venant d’Allâh –ta’ala-.
Quant à sayidina Moujâhid, il dit que Sultân signifie ici Hujja.
[Tafsîr al-hidaya ila bouloûgh al-nihaya, Makkiy ibn Abiy Tâlib (mort en 437 de l’Hégire)]
L’Imâm at-Tabariy dit dans son tafsîr, après avoir mentionné toutes les interprétations données à propos du mot Sultân : « Et l’avis dont il est le plus probables qu’il soit le bon est l’avis de celui qui dit : Le sens de « excepté à l’aide d’un Sultân« est : excepté à l’aide d’une Hujja, ou d’une Bayyina (*), car il s’agit là du sens du mot « Sultân » dans la langue (pure) des arabes. »
[Jâmi’ al-bayân fi tafsir al-Qor’ân – At-Tabariy (mort en 310 de l’Hégire)]
(*) En arabe, les mots Hujja et Bayyina désignent : ce qui sert de garantie; assurance, caution, preuve, témoignage. Or ce qui sert de garantie, l’assurance, la caution, la preuve et le témoignage par excellence n’est autre que la clef du Paradis : « lâ ilâha illa Allâh, Muhammadun RassoûluLlâh » …
Pour appuyer cette affirmation, considérons le tafsîr de l’Imâm ar-Râziy (rahimahuLlâh) : « « Mais vous ne pourrez en sortir excepté à l’aide d’un pouvoir (Sultân). » Ceci est une indication de l’établissement du Tawhîd. Et en apparence, c’est comme si Il –ta’ala– disait : ش toi l’insouciant, tu n’es pas capable de sortir, par ton esprit, du domaine des cieux et de la terre, tant que tu n’auras pas vu une preuve d’entre les preuves de l’Unicité. Et si toutefois tu parvenais à sortir du domaine des cieux et de la terre, sache que tu n’en sortirais que grâce à un pouvoir (Sultân) se trouvant en dehors des cieux et de la terre, apportant une preuve déterminante de Son Unicité. Et le Sultân désigne ici la Force parfaite et exhaustive (quwat al-kâmila). »
[Tafsîr Mafâtih al-Ghayb, at-tafsîr al-kabîr – Al-Râziy (mort en 606 de l’Hégire)]
Plus explicite encore, notre maître sidi ibn ‘Arabi (qaddas Allâhu sirrahu) dit dans son tafsîr :
« « excepté à l’aide d’un pouvoir (Sultân). » C’est-à-dire une preuve évidente (hujjatun bayyinah), qui n’est autre que le Tawhîd, le dépouillement (tajrîd) et l’individuation (tafrîd) par la Science, les œuvres et l’annihilation en Allâh. »
[Tafsîr al-Qor’ân – Ibn ‘Arabi (mort en 638 de l’Hégire)]
Pour comprendre cette parole de manière plus concrète, revenons à la partie traitant des maqâmâte du Nom « Allâh » :
- le Tawhîd est atteint par la Lecture de la Lettre hâ’ : tout d’abord l’accès à la Science qui découle de cette Lettre (sachant que la Science est une Lumière), puis la mise en pratique de cette Science (par le dhikr), et enfin le fanâ’ dans la Lettre hâ’.
- le Tajrîd est atteint par la Lecture des deux lâm : tout d’abord l’accès à la Science (la Lumière) qui découle de ces deux Lettres ; puis la mise en pratique de cette Science, et enfin le fanâ’ dans chacune des deux Lettres. (devenant ainsi entièrement « lillâh »)
- le Tafrîd est atteint par la Lecture du Alif al-Mouqaddar : l’accès à sa Science, puis sa mise en pratique, et enfin le fanâ’ dans le Alif al-Mouqaddar.
En d’autres termes, la sortie du domaine des cieux et de la terre (l’âme humaine limitée) n’est possible que par la réalisation de la Parole « lâ ilâha illa Allâh, Muhammadun RassoûluLlâh », au travers de la Lecture du Nom « Allâh ». Ceci est accessible par le compagnonnage d’un Shaykh accompli, détenteur d’un idhn divin, et transmettant de cœur à cœur la Lumière Muhammadienne. Par cette Lumière, le disciple réalise la Lecture du Nom divin « Allâh » en débutant par sa Lettre hâ’, puis les deux lâm, puis l’espace situé entre le lâm et le Alif al-Mouqaddar, jusqu’à approcher le Alif al-Mouqaddar lui-même. Après le fanâ’ dans ce maqâm, on considère que le cheminant a réalisé la première des sept Lectures du Nom « Allâh »… soit, dit autrement, qu’il est parvenu à sortir du premier des sept domaines des cieux et de la terre, c’est-à-dire des limites de sa nafs, et est devenu esprit.
On lit ainsi dans le tafsîr de la sourate ar-Rahmân, de l’Imâm al-Quchayriy (quddisa sirruh) : « Il est dit aux nafs ténébreuses : « peuple de djinns et d’hommes ! Si vous pouvez sortir du domaine des cieux et de la terre », par la portée de votre vision intérieure « alors faites-le ! » Mais vous n’en avez pas la capacité : vos esprits sont emprisonnés dans l’entité de vos essences (vos corps), et dans la limite de ce que vous connaissez de l’univers. « Vous ne pourrez en sortir excepté à l’aide d’un pouvoir (Sultân) » c’est-à-dire par la force du pouvoir (Sultân) que vos esprits ont sur vos nafs… et alors, vos esprits tireront vos nafs vers l’univers spirituel, et ceci sera rendu possible par le compagnonnage d’un excellent médecin. Alors, votre vision intérieure (Basîra) sortira des limites du monde, et vous accéderez à l’espace illimité de la vision (‘ayân). »