بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين

Question 1 : Pourquoi ces gens accusent-ils le Shaykh Educateur d’être un sorcier ? Est-ce qu’effectivement la Tariqa Karkariya a un lien quelconque avec la sorcellerie ?
Question 2 : Qu’est-ce que la sorcellerie ? Quel est le statut du sorcier selon la Noble Chari’a, et quel est le statut de celui qui accuse faussement et sans preuve son frère de sorcellerie ?

Est-ce que les Talâsim, les Awfâq et les noms non-arabe entrent dans le domaine de la sorcellerie ? Est-ce que la Science des lettres est considérée comme faisant partie des sciences diaboliques ?

Tout d’abord, il conviendra de rappeler que ces sciences ne sont pas en elles-mêmes l’objectif du cheminant vers Allâh. Au contraire, le seul et unique But de l’aspirant sincère, c’est l’accès à la Connaissance d’Allâh ﷻ, afin que le serviteur parvienne à retourner à la Seigneurie ce qui lui revient, et à la servitude ce qui lui revient. Or en cela, il n’aura besoin de rien d’autre que de la Lumière et des Secrets : c’est par eux deux qu’il parviendra à la pleine réalisation de l’état de servitude ainsi qu’aux jardins de la Ma’rifa. Quant à ces sciences, elles ne sont que des ramifications émanant de la Voie. Concernant les Talâsim et les Awfâq, ils relèvent de la spiritualité de sayidina Sulaymân (‘alayhi s-salâm), tandis que la science des Lettres relève quant à elle de celle de sayidina ‘Issa (‘alayhi s-salâm) : c’est là une chose que connaissent tous les gens doués de capacité à percevoir et goûter aux sens ésotériques, toute époque confondue.

L’Imâm Muslim rapporte un Hadîth de Mou’âwiya ibn al-Hakam as-Sulamiy qui dit :
« Alors que nous accomplissions la prière avec le Messager d’Allâh ﷺ, un homme d’entre ses compagnons éternua. Je lui dis alors : « Qu’Allâh te fasse miséricorde. » Les gens me dévisagèrent alors de leurs regards, et je m’écriais : « Qu’avez-vous donc à me regarder comme cela ? ». Ils se mirent alors à frapper de leurs mains sur leurs cuisses, je compris qu’ils cherchaient à me dire de me faire garder le silence, et je me tus donc. Puis, lorsque le Messager d’Allâh ﷺ eut achevé sa prière… je jure ne jamais avoir vu avant lui ni après lui de meilleur enseignant. Par Allâh, il ne m’a pas réprimandé, ni insulté, ni frappé. (Plutôt,) il dit : « Il ne convient que la prière soit perturbée par les paroles des gens. Plutôt, il ne s’agit que de tasbîh, de takbîr et de récitation du Coran », ou du moins c’est en ce sens que parla le Messager d’Allâh ﷺ. Je dis alors : « Ô Messager d’Allâh, nous sommes un peuple qui sort tout juste de la Jâhiliya, après que Allâh nous ait fait parvenir l’Islâm. Mais il est parmi nous des gens qui ont l’habitude d’aller voir les devins (kâhin). » Il répondit : « N’y allez pas. » Je repris : « Et il est parmi nous des gens qui tirent des présages à partir de l’observation des oiseaux. » Il répondit : « C’est là une chose qu’ils reçoivent dans le cœur, mais qui ne les empêche pas d’accomplir (ce qu’ils avaient l’intention de faire). » Je repris : « Et il est parmi nous des gens qui pratiquent la géomancie (étude des traits dans le sable). » Il répondit : « Il y avait un Prophète qui pratiquait la géomancie : celui qui la pratique comme lui le faisait n’est pas blâmable. »

Al-Qurtubiy dit :
« Makkiy relate dans son tafsîr une narration selon laquelle ce Prophète pratiquait la géomancie à l’aide de son index et de son majeur, grâce auxquels il traçait des traits dans le sable puis les balayait. Et selon ibn ‘Abbâs, il s’agit de tracer des traits rapidement et sans les compter, puis une fois fait de les effacer doucement deux par deux : si au final il reste deux traits, cela veut dire que l’objet de la consultation réussira, et s’il ne reste qu’un seul trait ce sera le signe de son échec. »

L’Imâm al-Nawawiy (rahimahullâh) a dit :
« Les savants ont divergé quant à la signification de ce Hadîth, et le sens correct est que celui qui pratique la géomancie de la même manière qu’il le faisait (le Prophète dont il est question), alors c’est permis. Mais étant donné que nous n’avons aucun moyen d’établir avec certitude que la pratique de quelqu’un soit conforme à la sienne, alors on considère que ce n’est pas permis. Je dis : l’avis correct est que celui qui voit par la Lumière d’Allâh ﷻ n’ignore rien de cela, et s’il n’en était pas ainsi, comment l’exégète de la Oumma sayiduna ‘Abdullâh ibn ‘Abbâs (radiAllâhu ‘anhuma) aurait-il pu nous décrire comment ce Prophète (‘alayhi s-salâm) pratiquait la géomancie ? »

Et ibn Hajar al-Haythamiy (rahimahullâh) explique ici ce que l’on désigne par « Awfâq » et dit :
« La science des Awfâq est une science issue de la relation existante entre les nombres, qu’il s’agira de considérer de manière spécifique, comme par exemple le cas de neuf compartiments dont la valeur numérique de chaque côté serait quinze. Ceci permet de réaliser certains besoins, de remédier au cas de possession par un djinn, d’empêcher les fausse-couches et de tout ce qui s’y assimile. Cela est régulé et établi par : « بطد زهج واح ». Al-Ghazâliy (rahimahullâh) recourait régulièrement à cela, au point que ceci lui fut attribué. Il n’y a aucun mal à l’utilisation de ceci à des fins licites, contrairement à une utilisation en vue d’une chose illicite, auquel cas al-Awfâq sont considérées comme de la sorcellerie selon al-Qarâfiy »
[ الفتاوى الحديثية ص 4  ]
Nous constatons donc que l’Imâm al-Qarâfiy a considéré al-Awfâq comme étant de la sorcellerie dans le cas où elles seraient utilisées en vue d’un résultat illicite, mais que par ailleurs il n’y a aucun mal en leur utilisation chez l’Imâm al-Haythamiy dans un cadre et à des fins licites… Médite donc à cela.

L’Imâm al-Chawkâniy (rahimahullâh) dit dans « Al-Badr al-Tâli’ », dans la biographie de al-‘Abbâs al-Tounsiy :
« Le Sayid al-‘Abbâs ibn Muhammad al-Maghribiy arriva à Sanaa en l’an 1200, connaissant de la Science des Lettres et des Awfâq. Nous avons vu de lui des choses étonnantes et extraordinaires, et nous avons pris de lui la Science des Awfâq, dans l’intention de nous essayer à ce savoir et non pas dans le but de nous y attacher. Lorsqu’il avait besoin de dirhams, il prenait des œufs qu’il cassait et mettait dans un récipient avant de réciter dessus, et c’est alors que les morceaux d’œufs se changeaient en dirhams. Au début, je pensais qu’il s’agissait de magie et de prestidigitation. Je pris donc le récipient et l’examinais, mais ne parvins pas à déterminer de quoi il en retournait. Je lui demandais de me donner une explication, et il me répondit : « Ces dirhams, c’est un khâdim d’entre les djinns qui les apporte et les place dans ce récipient en quantité égale au nombre de morceaux d’œufs que j’y ai mis. Il s’agit là d’une dette qu’il a et qu’il remboursera jusqu’à en être entièrement acquitté. » Il se montra (au début) très hésitant vis-à-vis de moi, lorsque je lui fis part de mon intérêt dans l’apprentissage de la science… (Par ailleurs) ses compagnons de voyage yéménites avec lesquels il était parti au Hajj nous ont décrit son intégrité et l’excellence de son comportement vis-à-vis d’eux durant le voyage… or la reconnaissance des gens du Yemen à son égard, ainsi que d’autres personnes, sont bien des preuves de son honnêteté et de son intégrité. Il était grand et trapu, au comportement exemplaire, blanc de peau et doté d’une grande force physique. Il avait mémorisé les textes de Fiqh Malikite et avait connaissance de quelques points de Oussoûl. Il mémorisait tout ce qu’il connaissait, et dès que la Vérité lui apparaissait il tendait vers elle. »

Par conséquent, si l’apprentissage de la Science des Awfâq était illicite, un savant de l’envergure de l’Imâm al-Chawkâniy en terme de savoir et de suivi de la Sunna n’aurait pas cherché à l’étudier, quand bien même c’eût été dans l’intention de s’y essayer seulement : on ne s’essaye pas à l’illicite !

Sache par ailleurs que le triangle de al-Ghazâliy est très connu chez les gens de science, et qu’il est appelé « بطد زهج واح », le triangle de Hujjat ul-Islâm, l’Imâm Abou Hâmid al-Ghazâliy, triangle que l’on appelle également Khâtim al-Ghazâliy, Wifq Zahl ou encore al-Wifq al-thulâthiy. Al-Qarâfiy dit dans al-Fouroûq, traitant du sujet des Awfâq : « Et al-Ghazâliy y recourait régulièrement, au point que lui fut attribué : ( ب ط د ز هـ ج و ا ح)

Concernant maintenant les Secrets des Lettres, le Shaykh al-Akbar ibn ‘Arabiy (rahimahullâh) dit :
« as-Sihr dans sa dimension absolue est néfaste, et en cela la part des Saints se limite à ce qu’Allâh leur a fait découvrir des Science des Lettres, laquelle n’est autre que la Science des Awliya. Ces derniers apprennent donc de ce que Allâh a placé dans les Lettres et dans les Noms en terme de particularités étonnantes et extraordinaires, des particularités par lesquelles les choses entrent en action, dans le monde réel comme imaginaire. Et bien que la sorcellerie (as-sihr) soit néfaste dans sa dimension absolue, elle est en revanche louable dans sa dimension limitée, que l’on considèrera dès lors comme relevant des prodiges (karamâtes) : il s’agit là de sorcellerie-même, chez les gens de Science. En effet, les sorciers contemporains à sayidina Moussa ont gardé cette connaissance qu’ils avaient de la sorcellerie, malgré qu’ils aient cru en le Seigneur de Moussa et de Haroun, qu’ils soient entrés dans la religion d’Allâh, aient préféré la vie future à celle de ce bas-monde et se soient montrés satisfaits du châtiment d’Allâh contre eux par la main de Pharaon… Tout ceci comme nous le disions, malgré qu’ils connaissaient la sorcellerie, que nous appelons chez nous (les soufis)  » ‘ilm as-Sîmiyâ« . Sîmiya est un mot provenant de « simah », qui en arabe veut dire signe, caractéristique, et qui renvoie à ce que (cette Science) donne comme effet par la réunion de Lettres et par leur assemblage, donnant différents noms et mots. Ainsi, parmi les gens se trouvent des personnes capables de donner l’ensemble de tout cela simplement dans « bismillâh« , et en ceci l’on retrouve le degré de la réunion de tous les Noms divins. Le serviteur descend alors ceci à la station de « Kun / sois », qui est un verset de la Fâtiha, et de là peut être accompli ce qui ne peut l’être avec la Basmala d’aucune autre sourate… mais la plupart des gens n’ont aucune connaissance personnellement réalisé de ceci, si ce n’est au travers des paroles transmises (khabar). La Basmala par laquelle entre en action absolument toute chose dans l’existence, c’est la Basmala de la Fâtiha. Quant à la Basmala des autres sourates, elles sont réservées à des cas bien particuliers. Et nous avons pu rencontrer Fâtima bint Muthnâ, qui faisait partie des plus grands vertueux, et qui étendait son influence active (tasrîf) sur le monde. Il est d’ailleurs apparu par elle des prodiges et des choses extraordinaires, particulièrement par la Fâtiha. Tout ceci je l’ai moi-même vu de sa part. Et elle s’imaginait que ces choses, tout le monde les connaissait ! Elle me racontait des choses incroyables et s’étonnait de voir quelqu’un en difficulté alors qu’il disposait de la Fâtiha résolvant toute chose : nul ne la lit sans obtenir d’elle ce qu’il veut. Ce n’est là rien d’autre que la privation divine (disait-elle). »
[ الفتوحات المكية (3/214) ]

Les négateurs comprennent de cela que le Shaykh Mouhiy d-dîn ibn ‘Arabiy prétend au statut licite de toute la sorcellerie (sihr), alors que ce n’est pas du tout ce qu’il a dit. Au contraire, il dit que la connaissance de cette Science dans une dimension limitée n’est pas illicite. Et on sait que par ailleurs le Shaykh ibn ‘Arabiy était un moujtahid dans les ramifications du Fiqh et le fait de tirer des statuts juridiques. Ce qu’il dit donc, c’est que malgré la profonde connaissance du sihr chez les sorciers contemporains à sayidina Moussa, cette connaissance ne leur a pas causé de mal. Par conséquent, ce que comprend cette la Science des Lettres en terme de bienfaits est permis et autorisé, tandis que ce qui entraine quelque chose de mauvais fait partie des grands péchés.

Evidemment ibn ‘Arabiy savait que la sorcellerie (sihr) est illicite (Harâm) et fait partie des actes assurant la perdition de celui qui les commet. Il dit en l’une de ses recommandations :
« Mange beaucoup d’huile et de ce qui contient de l’huile, et éloigne toi des sept péchés entraînant la perdition (moûbiqâte) : associer à Allâh (chirk), la sorcellerie (sihr), tuer l’âme que Allâh a rendu sacrée excepté pour la Vérité, s’emparer du bien de l’orphelin, toucher l’usure, déserter le champ de bataille et accuser faussement les femmes mariées, innocentes et croyantes. »
[ الفتوحات المكية (7/265) ]

Ibn ‘Arabiy (radiAllâhu ‘anhu) apprit la Science de la Sîmiya dans le deuxième ciel, lorsqu’il y fut élevé :
« Et dans cet état de Présence spirituelle on apprend la Science de la Sîmiya, basée sur les Lettres et les Noms (divins), et non pas sur les pratiques mêlant les fumées, le sang et autres… »
[ الإسفار عن رسالة الأنوار ص 126 ]

Quant à ce qui est des noms non-arabes, l’Imâm et Shaykh al-Islâm Ahmad ibn Hajar al-Haythamiy al-Makkiy, Shâfi’iy de madhhab, Soufiy Ahmadiy Badawiy de Tarîqa et de source spirituelle, dit :
« Question : Est-ce que l’écriture de noms dont on ne connait pas le sens et le tawassoul par ces noms est détestable (makroûh), ou bien illicite (Harâm) ?

Ce à quoi il répondit (radiAllâhu ‘anhu) : Al-‘Izz ibn ‘Abdessalâm, comme je l’ai déjà rapporté de lui, a formulé la fatwa suivante dans son « Charh al-‘Abbâb » :
Concernant l’écriture de lettres inconnues dans le but (de soigner) des maladies, leur lecture n’est pas permise, non plus que la roqia par elles, car lorsqu’il fut questionné ﷺ au sujet des types de roqia pratiquées il dit : « Présentez vos roqia » et lorsqu’ils les eurent présentées il dit ﷺ : « Il n’y a pas de mal ». Il a ordonné cela (que les roqia lui soient présentées), parce qu’il se peut que certaines pratiques comprennent du koufr. Par ailleurs si leur écriture est illicite, alors le tawassoul par elles l’est aussi. Cependant si l’on trouve dans un livre considéré comme étant un livre de confiance, au niveau de la science et de la religion qu’il contient, alors si ce livre nous enjoint à l’écriture ou à la lecture (de ces lettres), alors cela peut être permis. En effet, si (l’auteur) a enjoint à cela, il ne l’a évidemment fait qu’après s’être assuré de leur sens, et à ce moment-là il n’y a aucun risque. »
[ الفتاوى الحديثية  » ( صـ / 69 ) ]

L’Imâm sidi Ahmad as-Sâwiy dans sa Hâshiya sur le Charh as-Saghîr de l’Imâm Ahmad ad-Dardîr al-Mâlikiy : « « Et on ne pratique pas la roqia à l’aide de noms dont on ne connaît pas le sens » : c’est-à-dire ce qui n’est pas transmis et rapporté de façon sûre, comme par exemple ce qui est pris des paroles de Aboul-Hassan as-Shâdhiliy à l’instar de son cercle, ou encore des noms que l’on retrouve dans les Hizb du maître ad-Doussoûqiy et al-Jaljaloûtiyah ».

A la lumière de tout ceci, nous établissons les points suivants :

-Ces choses en elles-mêmes ne sont pas néfastes : elles le deviennent seulement dans le cadre d’une utilisation à des fins illicites.
-Si ces choses sont rapportées de gens reconnus pour leur piété et leur vertu, alors elles sont permises ; mais si on ne connaît pas celui qui les a exprimées, alors il est obligatoire de s’abstenir.
-Toute réalité et toute science qui irait à l’encontre de la Charî’a est faux et mensonger (bâtil).
-Allâh ﷻ octroie ces Sciences à Ses Awliya, en raison de leur droiture et de leur suivi de sayidina al-Mustafa ﷺ. Ce sont des compréhensions auxquelles ils ne parviennent qu’au travers du dhikr, or l’évocation d’Allâh ne peut mener qu’au bien : une assise où l’on évoque le Nom d’Allâh ne peut pas être approchée par les Shayâtin. Nul créature ne peut faire de mal lorsque le Nom d’Allâh est évoqué, comment pourrait-on donc penser que certaines Sciences acquises par les évocateurs proviendraient de Shayâtin ?
-La sorcellerie n’est considérée comme telle que dans la mesure où elle mène à commettre du chirk ou bien un grand péché, car c’est uniquement dans ces cas-là que descendent les Shayâtîn, conformément à la Parole d’Allâh ﷻ : « Vous informerais-je sur qui les diables descendent-ils ? Ils descendent sur tout calomniateur, pécheur. Ils tendent l’oreille… cependant, la plupart d’entre eux sont menteurs » [s26.v221/22].
Concernant ce verset, l’Imâm Ahmad ibn ‘Ajîba (radiAllâhu ‘anhu) dit :
« Vous informerais-je sur quels cœurs les diables descendent-il, puis y élisent domicile ? Ils descendent sur le cœur de tout calomniateur, pécheur, dépouillé de toute Lumière, rempli de waswas et de doutes. (Ces personnes) tendent l’oreille vers l’agitation de dounia et ce qu’il s’y passe : c’est pour cela qu’elle constitue une tentation (fitna). Si le cœur parvient à se détourner de ce qu’il se passe dans ce bas monde ainsi que des gens qui le peuplent, alors la Lumière vient l’habiter et il entre en intimité avec Allâh. Et si au contraire son cœur s’apaise par l’attention qu’il porte à ce bas monde et aux gens qui le peuplent, alors ce sont les ténèbres qui l’habitent, il n’entrera en intimité qu’avec la création, et il se détournera du Vrai. C’est la raison pour laquelle il fut dit : « Il convient au croyant d’être à l’image de la tortue : lorsqu’elle est seule elle est à l’aise, mais dès qu’elle voit quelqu’un elle rentre sa tête. » La majorité de ce qu’on entend des agitations de ce bas monde sont des mensonges, et c’est à cela que se réfère la fin du verset : « la plupart d’entre eux sont des menteurs ». De manière générale, ce qui détruit le cœur, c’est son engouement pour la poésie, et dans le Hadîth, le Prophète ﷺ dit en ce sens : « Que l’intérieur de l’un d’entre vous se remplisse de pus vaut mieux que le fait qu’il se remplisse de poésie », excepté pour celui dont la poésie exprime l’Unicité d’Allâh, les états du cheminement spirituel comme l’ascétisme et le renoncement à ce bas-monde, ou bien l’encouragement à délaisser le fait de compter sur lui, le détournement des illusions et de ses embellissements éphémères, le fait de se laisser tenter par de vains plaisirs, etc. Ou bien encore, la poésie faisant les louanges du Prophète ﷺ, ou bien des Mashaykh qui parvinrent à Lui ﷻ, mais ceci à la condition que ce le dhikr d’Allâh soit prioritaire (à cette poésie). »
-Les actes de bien de manière générale ne peuvent en aucun cas être réunis avec les ténèbres.

Voici maintenant une liste non exhaustive de personnalités faisant partie de l’élite des privilégiés, et qui plongèrent dans certaines de ces Sciences, afin que tu réalises qu’il s’agit là des Sciences des Awliya :

-L’Imâm Aboul-Hassan as-Shâdhiliy (radiAllâhu ‘anhu) : voir son ouvrage « As-Sirr al-Jalîl »
-L’Imâm Mouhiy d-dîn ibn ‘Arabiy (radiAllâhu ‘anhu) : voir « al-Foutoûhâte al-Makiya » et autres.
-L’Imâm ‘AbdelQader al-Jilani (radiAllâhu ‘anhu) : voir ses Hizb.
-L’Imâm Ahmad Zarroûq (radiAllâhu ‘anhu) : voir son ouvrage d’explication des Asmâ’ Allâh ul-Husnâ. Et il explique dans son livre « Qawâ’id at-Tassawwuf » :
« La personne du commun des musulman a un soufisme qui lui convient : celui que al-Mouhâsibi a développé dans ses ouvrages, ainsi que ceux qui ont suivi la même voie que lui.
Le juriste (faqîh) a un soufisme qui lui convient : celui que décrit ibn al-Hajj dans son « Madkhal« .
Le rapporteur de Hadîth (mouhaddith) a un soufisme qui lui convient : celui de ibn ‘Arabi dans son « Sirâj al-Mourîdîn« .
L’adorateur (‘abid) a un soufisme qui lui convient : celui d’al-Ghazâliy dans son « Minhâj al-‘Abidîn ila Jannati Rabbi l-‘Alamîn« .
La personne physiquement active a un soufisme qui lui convient : celui que décrit al-Quchayriy dans sa « Risâlat al-Quchayriya« .
La personne particulièrement attachée aux rites de la religion a un soufisme qui lui convient : celui de Abou Tâlib al-Makkiy dans « Qoût al-Qouloûb« , ou d’al-Ghazâliy dans « Ihiya’ ‘ouloûm ad-dîn« .
Le sage a un soufisme qui lui convient : celui décrit par al-Hâtimiy dans ses ouvrages.
Le rationnel a un soufisme qui lui convient : celui des ouvrages de ibn Sab’în.
La personne attachée à l’étude des éléments a un soufisme qui lui convient : celui que décrit al-Boûniy dans ses Secrets.
La personne attachée aux fondements (oussoûl) a un soufisme qui lui convient : celui qu’a parfaitement traité as-Shâdhiliy.
… que chacun établisse donc à quelle branche il s’affilie. »
(Et comme tout un chacun le sait, al-Boûniy a beaucoup parlé de Talâsim et des Secrets des Lettres.)
-Hujjat ul-Islâm, al-Imâm al-Ghazâliy (radiAllâhu ‘anhu) comme il l’expliqua dans « al-Mounqidh min ad-Dalâl » ainsi que dans « Risâlat Sirr al-‘Alamîn wa Kashf mâ fi ad-Dârayn« .
-L’Imâm ibn al-Hâjj at-Telemsâniy (radiAllâhu ‘anhu), auteur du précieux ouvrage « al-Madkhal« , ainsi que dans son ouvrage « Choumoûs al-Anwâr wa Kounoûz al-Asrâr fi ‘ilm al-Houroûf wa Roûhâniya. »
-L’Imâm ‘Abdullâh ibn As’ad ibn ‘Ali al-Yâfi’iy (radiAllâhu ‘anhu) dans son livre : « Ad-Durr al-Nadhîm fi Khawâss al-Qor’ân al-‘Adhîm. »
-L’Imâm Burhân ad-Dîn ibn Quzâ’ah (radiAllâhu ‘anhu).
-L’Imâm al-Nabbahâniy (radiAllâhu ‘anhu) dans son « Jâmi’ Karamât al-Awliya »
-L’Imâm Mâ’ al-‘Aynayn (radiAllâhu ‘anhu) dans son livre « Na’t al-Bidâyât wa Tawsîf al-Nihâyât« .

La liste est longue, cependant comme nous l’avons précédemment dit, ces sciences-là ne sont pas le but : le seul et unique But, c’est Allâh ﷻ. Cela dit, il faut bien comprendre que celui qui renie ces sciences renie par là-même l’ensemble de tous les soufis, ceux à qui Allâh ﷻ a fait don de ce Savoir. Et si cela te surprends, sache que tu devrais plutôt être surpris de celui qui renie et dénigre ces Sciences sans en avoir aucune connaissance… Comment peut-on ainsi juger de ce dont on ignore tout ? La vérité, c’est que tout trait et tout Talsam ne sont pas systématiquement Harâm, surtout lorsque l’on retrouve cela chez les plus grandes références de la communauté, et lorsqu’on sait qu’ils n’ont obtenu cela par rien d’autre que le dhikr d’Allâh ﷻ, à toute heure du jour et de la nuit. Nous avons bien vu précédemment que lorsqu’on vint décrire à l’Imâm Ahmad (radiAllâhu ‘anhu) l’une de ces choses qu’il ne parvint pas à cerner : il s’est abstenu de rendre un jugement. Où en es-tu donc, toi, du savoir de l’Imâm Ahmad, de sa piété et de sa crainte d’Allâh ?