بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين

Assise du 3 février 2016, en présence du Shaykh Mohamed Faouzi Al Karkari (qadassa Allahu sirahu)

Alors que le soleil se couchait et que les lueurs du crépuscule envahissaient le ciel ,il fut demandé  au Shaykh Muhammad Fawziy al-Karkariy (qudissa sirruh) l’autorisation de lire les Hikam de sidi Ibn ‘Ata Allah Iskandari (qudissa sirruh) , ce à quoi Notre Shaykh répondit :

« Sache qu’il fut dit par les savants que si il n’y avait pas eu de coran, la lecture des Hikam suffirait pour la Prière.

Après être sorti de la khalwa, notre shaykh, qu’Allah le prenne dans sa miséricorde, nous conseilla de lire uniquement deux livres : les Hikam de l’Imam Ibn Ata Allah Iskandari (qudissa sirruh) et le recueil de poèmes du Shaykh Ahmad al alawi (radi Allah anhu). Nous donnions tellement d’importance aux paroles de notre shaykh que nous n’avions pour notre cheminement que trois livres… le livre d’Allâh, le recueil de poèmes et les Hikam.

N’ayant pas d’endroit où nous isoler, nous nous rendions sur le lieu de travail de notre frère.Au fond de son commerce se trouvait une pièce que l’on pouvait fermer à clé. C’est là que pendant plusieurs mois, après avoir fait nos ablutions et nous être assis dans la direction de la Qibla, nous lisions les Hikam. Non seulement nous les lisions, mais nous notions les compréhensions qui nous venaient à la lecture des sagesses… Et nous ne passions pas à un autre Hikam tant que nous n’avions pas appliquer la sagesse à notre propre ego. Lorsque nous lisions une nouvelle sagesse, nous faisions tout pour nous y conformer, parfois il fallait plusieurs semaines, parfois quelques jours… le principal était de les appliquer. Nous sommes restés dans cet état des semaines durant… Au point que nous considérions le livre des Hikam comme notre propre Ami, et quel Ami ! Lorsque nous avions le feu de l’amour en nous, nous lisions alors les poèmes de shaykh ahmad al alawi (qudissa sirruh).

C’est ainsi que plusieurs semaines s’écoulèrent jusqu’au jour où nous sommes tombés sur un Hikam qui nous bouleversa et que jamais nous n’oublierions. Il s’agissait d’une sagesse expliquant le véritable sens de la remise confiante en Allah (tawakkul). Et l’exemple donné était celui de sayiduna Ibrahim (alayhi salam), lorsqu’il fut catapulté après avoir refusé l’aide d’un ange et s’en être remis entièrement à son Seigneur. Un état spirituel nous saisit alors, et sur le moment même nous avons vidé nos poches de tout ce qu’elles contenaient… et nous sommes sortis dans la rue avec la ferme intention de connaître et de vivre le Tawakkul.

Nous jeûnions le jour et passions nos nuits dans les cimetières à invoquer notre Seigneur… Lors de notre première siyaha qui dura 10 années, si nous venions à ne pas trouver de quoi nous nourrir alors nous allions mendier dans les rues mais au cours de cette seconde siyaha, nous demandions à Allah de nous nourrir et nous jurions que seulement ce qui proviendrait de Lui entrerait dans notre bouche. Si après la prière du Maghreb, nous ne trouvions pas de nourriture, alors pour couper le jeûne, nous léchions nos doigts et nous mélangions notre salive à la terre qui se trouvait sous nos pieds avant de l’avaler. Pendant plusieurs jours, nous avons souffert de la faim et du froid. Ne vous imaginez pas que dans notre nafs nous n’avions pas de doute, bien au contraire, nous nous demandions : « que pourrions-nous bien manger, où pourrions-nous bien dormir »… mais à chaque fois, c’est vers Notre Seigneur que nous nous tournions… Nous lui demandions de subvenir à nos besoins. Cela dura plusieurs mois , jusqu’au jour où Allah nous permit d’être dans un état tel que si nous venions à désirer un dirham, nous trouvions ce dirham devant nous par terre. Si nous désirions du pain, nous trouvions le pain à même le sol… Subjugué, nous implorions Allah de nous expliquer comment cela fut-il possible… Peut être la pierre se changeait-elle en argent ? Peut être tombait-elle du ciel ? Allah exauça notre demande. A la sortie de la prière de asr, en face de la mosquée, nous vîmes un commerçant compter ses billets… alors, comme par miracle, un billet sortit de la liasse, s’envola dans le ciel et finit par atterrir juste en face de nous. Nous avons pris le billet pour le rendre au commerçant. Après avoir compter sa liasse, il nous jura qu’aucun sou ne lui manquait… Nous lui avons juré avoir vu ce billet sortir de sa liasse ce à quoi il répondit par le négatif.

Après presque un an dans cet état, nous sommes retournés dans le commerce de notre frère pour relire les Hikam. Comme nous étions naïfs. Nous pensions que lorsque l’Imam Ibn Ata Allah iskandari parlait du miroir du cœur, il parlait d’un véritable miroir.Nous nous disions que si le mot miroir avait été utilisé, c’est qu’un secret se cachait derrière. Alors nous nous sommes placés face au miroir et avons commencé le dhikr du Ism Al-Adham , en ayant la ferme intention de disparaître du Miroir… des heures et des jours durant, nous invoquions Allah devant ce miroir jusqu’au jour où nous avons complètement disparu. Nous n’avions plus de reflet et lorsque nous regardions notre corps c’est comme si il était devenu invisible. Nous voyions le Mur derrière notre dos , comme si nous étions devenu un œil sans corps. Ainsi, nous nous sommes dit, si nous n’avons plus de corps, alors pourquoi ne pas entrer dans le miroir ? En entrant dans le miroir, nous avons atteint des compréhensions qu’il nous est impossible d’exprimer… Cela partait d’une incompréhension mais Allah jugea notre intention bonne et exauça notre demande. Comprenez lorsque Je vous dis qu’Allah est bon et que sa bonté n’a aucune Limite. Qu’Il est beau et que sa beauté ne saurait être contenue… Comment ne pas l’aimer ?

Après le départ vers la dernière demeure de notre Shaykh, nous sommes devenus Shaykh après avoir reçu l’autorisation de notre Shaykh puis celle du Prophète (sallAllah aleihi wa salam) à l’état d’éveil puis celle venant directement d’Allah (subhanahu wa ta’ala), les premiers cours que nous avons dispensé étaient le tafsir des poèmes du shaykh Ahmad al alawiy (qudissa sirruh) puis le tafsir des Hikam de l’imam Ibn Ata Allah Iskandariy (qudissa sirruh). Durant près de deux ans, nous avons expliqué aux fuqarah les sens des Hikam. Nous qui ne comprenions aucun livre, sommes devenus de ceux qui enseignent les livres… Nous donnions tellement d’importance à ces deux livres qu’après avoir terminé le tafsir des deux livres, Shaykh Ahmad al Alawiy (qudissa sirruh) et l’Imam ibn Ata Allah Iskandari (qudissa sirruh) vinrent en personne dans le malakut nous remercier. Shaykh Ahmad al Alawi (qudissa sirruh) nous fit alors visiter sa zawiya à Mostaghanem et nous montra comment il égorgea un bélier pour inaugurer sa Zawiya et c’est pourquoi nous avons également égorgé un bélier pour l’inauguration de cette Zawiya.

Les karamates et dévoilements sont plaisants à écouter mais sache que tout ce que nous te disons n’a pour seul but que tu réalises l’importance du goût. Lire un livre comme on lit le journal n’a aucun sens. Combien sont-ils à avoir des bibliothèques sur le Tassawuf mais son incapable d’expliquer une seule phrase des livres qu’ils prétendent lire ? Lis avec ton ego et tu ne tireras rien des livres, lis les avec ton cœur et les réalités commenceront à apparaître, lis les avec ton âme et tu goûteras aux sens spirituels, lis les avec les secrets et tu en tireras des compréhensions infinies. C’est par ce goût et cet amour que nous restons avec vous, que nous nous sommes mariés, que nous avons eu des enfants… Nous ne sommes devenus Shaykh qu’en ayant lu deux livres. »