Chapitre II

Concernant sa parole : « la Muraqa’ah, sunnah ? Aywa ! ». S’y trouve la preuve que la muraqa’h est une sunna des prophètes et des awliya de même qu’une explication du fait que la muraqa’ah n’est pas un vêtement de célébrité. S’y trouve aussi la preuve que Hamdi Ben Aissa est un menteur diffamateur.

Non content d’accuser des musulmans d’égarés sans aucune raison ni preuve, Hamdi Ben Aissa s’enfonce dans les ténèbres de sa jalousie en s’attaquant cette fois-ci à la muraqa’ah que portent les disciples de la Tariqa Karkariyah. Après les avoir traités de clowns sans aucune honte, il prétend que la muraqa’ah n’est pas une sunnah. Comble du mensonge et de la calomnie, Ben Aissa prétend ensuite que la muraqa’ah que portent les karkaris coûte cinq cents dollars américains. Oui, vous avez bien lu, cinq cents dollars américains. Il prétend en plus de cela détenir des informations sûres de cette chose..

O Hamdi, pourquoi ne t’es-tu pas tu encore une fois ? Pourquoi t’es-tu enfoncé dans la boue en salissant ton livre qui te sera jeté à la face de toutes les créatures ? En effet, tu n’as accumulé que mensonges et élucubrations que n’importe quel musulman un tant soit peu au courant de l’histoire distingue.

Il te suffit de savoir que la muraqa’ah que portent les karkaris n’est pas le fruit d’un penchant de l’égo ou de quoi que ce soit de ce genre. Cette muraqa’ah, ainsi que la forme carrée de ses morceaux et les couleurs qui la composent proviennent d’un ordre direct du meilleur des véridique, le prophète sayyiduna Muhammadﷺ, ordre reçu à l’état d’éveil et non en sommeil. Nous disons cela en sachant que le hadith le plus authentique de toute la sunnah dit :

من كذب علي متعمدا فل يتبوأ مقعده من النار

« celui qui ment sur moi volontairement, qu’il prépare sa place en enfer ».

Le port de cette muraqa’ah est un ordre direct du prophète ﷺ adressé aux disciples de cette voie! Pour tout musulman de ahlus sunnah, cela suffit amplement comme justification. Que dire donc du fait que nombre de disciples de cette voie ont vu les sahaba, toujours à l’état d’éveil, porter une muraqa’ah de cette même forme et de ces mêmes couleurs ? Rien que cela suffirait comme justification car porter un tel habit n’est en rien contraire aux règles du fiqh. Mais qui osera encore dénigrer le port de cette muraqa’ah alors qu’il s’agit sans aucun doute d’une sunnah des prophètes et des awliya ?

La muraqa’ah est une sunnah des prophètes et des awliya

A la question de savoir si le prophète ﷺ a porté des habits rapiécés, des muraqa’at, la réponse est assurément oui sans ambages. Cela est une évidence comme le soleil à son zénith. Ainsi, dans le Sahih d’al Bukhariy :

عن أبي بردة قال أخرجت إلينا عائشة رضي الله عنها كساء ملبدا وقالت في هذا نزع روح النبي صلى الله عليه وسلم

Selon Abu Burdah : « Aishah sortit pour nous un manteau rapiécé et dit : « C’est dans ceci qu’a été retiré l’âme du prophète ﷺ».

De même, dans le Sahih de Muslim

عن أبي بردة قال دخلت على عائشة فأخرجت إلينا إزارا غليظا مما يصنع باليمن وكساء من التي يسمونها الملبدة قال فأقسمت بالله إن رسول الله صلى الله عليه وسلم قبض في هذين الثوبين

Selon Abu Burdah : « je suis entré chez ‘Aishah et elle sortit pour nous un izar vil de ceux qu’on fabrique au Yemen ainsi qu’un manteau de ceux qu’ils appellent « mulabadah » et dit : « Je jure par Allah que le messager d’Allah est mort dans ces deux habits »

Le sens du mot « mulabadah » et « mulabad » utilisé dans ces deux hadiths est en soi clair. Dans al Nihayah, Ibn Al Athir a dit :

لبد ) ( هـ ) فيه  » أن عائشة أخرجت كساء للنبي – عليه الصلاة والسلام – ملبدا  » أي : مرقعا . يقال : لبدت القميص ألبده ولبدته . ويقال للخرقة التي يرقع بها صدر القميص : اللبدة

Labad : a été rapporté dessus : « Aishah a sorti un habit du prophète ﷺ qui était « mulabbad » C’est-à-dire rapiécé. On dit : « j’ai rapiécé le qamis, il l’a rapiécé, elle l’a rapiécé (déclinaison différente du verbe). On dit aussi à propos de la khirqah dont est rapiécée la partie du qamis : « al labadah ».

De même, le Mula ‘Ali ibn al Qariy a dit :

( وإزارا غليظا ) أي خشنا ( فقالت ) أي دفعا لتوهم أن هذا اللبس كان في أول أمره قبل أن يوسع الله عليه بفتحه ونصره ( قبض ) بصيغة المجهول والقابض معلوم أي أخذ ( روح رسول الله صلى الله عليه وسلم في هذين ) أي تواضعا وانكسارا وعبودية وافتقارا ، وإجابة لدعائه مرارا اللهم أحيني مسكينا ، وأمتني مسكينا ، وهذا الحديث أخرجه البخاري أيضا ، وفي رواية  » إزارا غليظا  » ، مما يصنع باليمن ، وكساء من هذه التي تدعونه الملبدة ، وهذه الرواية تفيد معنى ثالثا لـ  » ملبدا  » ، وهو أنه صفة كاشفة لكساء ، وأن التلبيد في أصل النسج دون الترقيع ، مع أنه لا منع من الجمع ، قال النووي : هذا الحديث وأمثاله يبين ما كان عليه صلى الله عليه وسلم من الزهادة في الدنيا ولذاتها ، والإعراض عن أعراضها وشهواتها ، حيث اختار لبسهما ، واجتزأ بما يحصل منه أدنى الكفاية بهما ، انتهى وفيه دليل على أن الفقير الصابر أفضل من الغني الشاكر ، ويرد على من قال أنه صلى الله عليه وسلم صار غنيا في آخر عمره ، ونهاية أمره ، نعم . ظهر له الملك والغنى ، ولكن اختار الفقر والفناء ; ليكون متبعا لجمهور الأنبياء ، ومتبعا لخلاصة الأولياء والأصفياء

« [ainsi qu’un izar vil] c’est-à-dire méprisable [et elle dit] à savoir, pour réfuter leur pensée fausse qu’il portait cet habit à ses débuts, avant qu’Allah ne déverse ses richesses sur lui par la victoire et son secours [qu’a été pris] à la forme passive et le fait d’empoigner a le sens de prendre [l’âme du messager d’Allah dans ces deux] c’est-à-dire, par humilité, par modestie, par servilité et pauvreté. Mais aussi comme réponse à son invocation perpétuelle : « Allah, fais moi vivre pauvre et fais moi mourir pauvre ». Ce hadith a été rapporté par al Bukhariy aussi. Dans un version : « Un izar vil parmi ceux qui sont fait au Yemen ainsi qu’un habit de ceux que vous appelez mulabadah ». Cette version-ci précise le sens du mot « mulabad ». C’est un descriptif de l’habit. Le fait de rendre un habit mulabad, originellement, est de tisser sans rapiécer, mais cela n’implique pas que les deux ne puissent être combinés. An Nawawiy a dit : « ce hadith et ceux qui lui ressemblent prouvent que le prophète ﷺ ce qu’était son ascétisme dans ce bas-monde et son détournement de ses atours et de ses passions. De sorte, il a choisi de porter ces deux habits et a réduit son vêtement à au strict nécessaire par eux deux ». Se trouve ici la preuve que le pauvre patient est meilleur que le riche reconnaissant. Cela réfute ceux qui disent que le prophète ﷺ est devenu riche à la fin de sa vie et à la fin de sa mission. Certes, la royauté ainsi que la richesse se sont présentées à lui. Mais il a préféré la pauvreté ainsi que l’extinction et cela pour suivre la majorité des prophètes mais aussi pour être suivi par l’élite des awliya et des purifiés. » »

Le rapport des deux chaykh se suffit à lui-même et il n’est point besoin d’aller plus loin. Il est clair donc que le prophète ﷺ portait des habits rapiécés, non pas par nécessité mais par choix bel et bien réfléchi comme l’a dit le chaykh ‘Ali ibn Sultan al Qariy. Or, dans la science des usul al fiqh, cela ne suffit pas pour établir une sunnah, bien que cela le soit dans le fiqh. La différence est que, si on accepte que le port d’un habit soit une sunnah au sens des usul al fiqh, cela reviendra à dire que cet habit fait partir de la législation et cela nul ne l’a jamais dit dans l’histoire. Par contre, si l’on dit qu’il s’agit d’une sunnah au sens du fiqh dans le sens que celui qui veut imiter le prophète ﷺ dans cela peut y trouver une récompense, ce caractère sera avéré et c’est le sens que l’on vise quand on parle de sunnah.

En effet, celui qui s’habille en muraqa’ah pour imiter le prophète ﷺ ne peut qu’en tirer une récompense au même titre que celui qui porte un turban dans le même but. Le turban non plus n’est pas une sunnah au sens des usul. Malgré cela, les savants n’ont cessé d’encourager son port. De même, pour celui qui le porte, ont été inventées nombre de conditions tel que le fait de laisser pendre les extrémités ou d’un mettre un sous le menton.

Or, si tu acceptes cela pour le turban, pourquoi ne l’acceptes-tu pas pour la muraqa’ah, O Ben Aissa ? Comment oses-tu prétendre qu’elle n’est pas une sunnah alors qu’il est certain que le prophète ﷺ la portait ainsi que ses compagnons ? Et qu’il a même recommandé à ceux qui veulent le rencontrer de procéder ainsi ?

Dans le Jami’ de at Timridhiy, au chapitre intitulé : « ce qui est rapporté sur le rapiècement de l’habit » :

عائشة قالت قال لي رسول الله صلى الله عليه وسلم إذا أردت اللحوق بي فليكفك من الدنيا كزاد الراكب وإياك ومجالسة الأغنياء ولا تستخلقي ثوبا حتى ترقعيه

Aishah a dit : le messager d’Allah m’a dit : « si tu veux me rencontrer, qu’il te suffise du bas-monde la provision du cavalier. Attention aux assemblées des riches ! Et ne jette un habit qu’après l’avoir rapiécé.

Le Mulla ‘Ali ibn al Qariy a dit :

حتى ترقعيه ) : بتشديد القاف أي تخيطي عليه رقعة ، ثم تلبسيه مرة ، وفيه تحريض لها على القناعة باليسير ، والاكتفاء بالثوب الحقير ، والتشبيه بالمسكين والفقير . في شرح السنة ، قال أنس : رأيت عمر بن الخطاب – رضي الله عنه – وهو يومئذ أمير المؤمنين ، وقد رقع ثوبه برقاع ثلاث لبد بعضها فوق بعض ، وقيل : خطب عمر – رضي الله عنه – وهو خليفة ، وعليه إزار فيه اثنتا عشرة رقعة اهـ . ( رواه الترمذي ، وقال : هذا حديث غريب لا نعرفه إلا من حديث صالح بن حسان ) : بتشديد السين ينصرف ولا ينصرف . قال محمد بن إسماعيل ) : أي البخاري ( صالح بن حسان منكر الحديث ) : وروى ابن عساكر ، عن أبي أيوب : أنه – صلى الله عليه وسلم – كان يركب الحمار ، ويخصف النعل ، ويرقع القميص ، ويلبس الصوف ، ويقول :  » من رغب عن سنتي ، فليس مني

« [jusqu’à ce que tu le rapièces] c’est-à-dire jusqu’à ce que tu couses dessus un morceau rapiécé et que tu le portes encore. Il s’agit ici d’une exhortation à se contenter de peu, de se contenter des habits méprisables et de ressembler aux pauvres et miséreux. Dans sharh al sunnah : « Anas a dit : « j’ai vu ‘Umar, alors qu’il était commandeur des croyants, ayant rapiécé son habit avec trois morceaux l’un sur l’autre ». Il a dit rapporté : « ‘Umar tint un discours alors qu’il était khalif, alors qu’il portait un izar avec douze morceaux rapiécés ». [l’a rapporté at Tirmidhiy et il a dit : c’est un hadith gharib, il n’a été rapporté que par Salih ibn Hasan] [Muhammad ibn Isma’il] c’est-à-dire al Bukhariy a dit : [Salih Ibn Hasan rapporte des hadith munkar]. Ibn ‘Asakir a rapporté, selon Abu Ayyub : « le prophète ﷺmontait une mule, raccommodait ses sandales, rapiéçait son habit et se vêtait de laine. Il disait « celui qui désire autre que ma sunnah n’est pas de moi. » »

La muraqa’ah est le signe de la pauvreté et de la répudiation du bas-monde. De sorte, le prophète ﷺ en a fait le signe distinctif de ceux qui ont abandonné les richesses du bas-monde pour celles de l’au-delà :

عن محمد بن كعب القرظي حدثني من سمع علي بن أبي طالب يقول إنا لجلوس مع رسول الله صلى الله عليه وسلم في المسجد إذ طلع مصعب بن عمير ما عليه إلا بردة له مرقوعة بفرو فلما رآه رسول الله صلى الله عليه وسلم بكى للذي كان فيه من النعمة والذي هو اليوم فيه ثم قال رسول الله صلى الله عليه وسلم كيف بكم إذا غدا أحدكم في حلة وراح في حلة ووضعت بين يديه صحفة ورفعت أخرى وسترتم بيوتكم كما تستر الكعبة قالوا يا رسول الله نحن يومئذ خير منا اليوم نتفرغ للعبادة ونكفى المؤنة فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم لأنتم اليوم خير منكم يومئذ

Selon ‘Ali ibn Abi Talib : « Un jour, nous étions assis avec le messager d’Allah ﷺ dans la mosquée quand apparut Mus’ab ibn ‘Umayr. Il n’avait sur lui qu’un habit rapiécé de toutes parts. Quand le prophète le vit, il se mit à pleurer pour les bienfaits qu’il avait avant et l’état dans lequel il était maintenant. Ensuite il dit : « Comment serez- vous quand vous aurez un habit du matin et un habit du soir? Qu’on vous posera un plat devant vous au même moment qu’on en ôtera un autre? Et que vous couvrirez vos maisons comme vous couvrez la ka’bah? » Ils dirent : « O messager d’Allah, nous serons mieux à cette époque là que maintenant. Nous serons libres pour l’adoration. Nous aurons assez à manger » Il dit : « Bien au contraire, vous êtes mieux aujourd’hui que vous ne serez ce jour là« « 

Si tu prétends que les compagnons du prophète ﷺ ne portaient cet habit que par pauvreté et contrainte parce qu’ils n’avaient pas les moyens d’en avoir d’autres, voici ce qui pour toi sera une réponse. En effet, il suffit d’observer les athar des compagnons pour savoir qu’ils avaient fait le choix volontaire de porter ce genre d’habits alors qu’ils avaient les moyens d’en porter d’autres en application du hadith :

عن سهل بن معاذ بن أنس الجهني عن أبيه أن رسول الله صلى الله عليه وسلم قال من ترك اللباس تواضعا لله وهو يقدر عليه دعاه الله يوم القيامة على رءوس الخلائق حتى يخيره من أي حلل الإيمان شاء يلبسها

Selon Sahl ibn Mu’adh, selon son père, le messager d’Allah ﷺ a dit : « Celui qui délaisse un habit par modestie alors qu’il peut le porter, Allah l’appelle au jour de la résurrection à la tête des créatures et le laisse choisir lequel des vêtements de la foi il veut vêtir »

Les sahaba avaient donc pris l’habitude, même après l’opulence qu’ils ont connue par l’extension du pays des musulmans, de garder les signes de modestie dans leur vêtement et leur mode de vie. Dans les sunan de Abu Dawud :

عَنْ عَبْدِ اللَّهِ بْنِ بُرَيْدَةَ أَنَّ رَجُلًا مِنْ أَصْحَابِ النَّبِيِّ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ رَحَلَ إِلَى فَضَالَةَ بْنِ عُبَيْدٍ وَهُوَ بِمِصْرَ ، فَقَدِمَ عَلَيْهِ فَقَالَ : أَمَا إِنِّي لَمْ آتِكَ زَائِرًا وَلَكِنِّي سَمِعْتُ أَنَا وَأَنْتَ حَدِيثًا مِنْ رَسُولِ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ رَجَوْتُ أَنْ يَكُونَ عِنْدَكَ مِنْهُ عِلْمٌ ، قَالَ : وَمَا هُوَ ؟ قَالَ : كَذَا وَكَذَا ، قَالَ : فَمَا لِي أَرَاكَ شَعِثًا وَأَنْتَ أَمِيرُ الْأَرْضِ ؟ قَالَ :  » إِنَّ رَسُولَ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ كَانَ يَنْهَانَا عَنْ كَثِيرٍ مِنَ الْإِرْفَاهِ ، قَالَ : فَمَا لِي لَا أَرَى عَلَيْكَ حِذَاءً ؟ قَالَ : كَانَ النَّبِيُّ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ يَأْمُرُنَا أَنْ نَحْتَفِيَ أَحْيَانًا

Selon Abdullah ibn Buraydah : « un homme parmi les sahaba du prophète ﷺ voyagea vers Fadalah ibn ‘Ubayd alors qu’il était en Egypte. Il arriva à lui et lui dit : « je ne suis pas venu te visiter mais j’ai entendu ainsi que toi un hadith du messager d’Allah ﷺ et j’espère que tu en auras quelque science. » Il lui dit : « Quel est-il ? » Il lui dit : « ceci et ceci ». Il dit après: « Qu’ai-je donc à te voir aussi ébouriffé alors que tu es le gouverneur d’Egypte ? » Il répondit : « Le messager d’Allah nous a interdit d’être trop opulents ». Il dit encore : « qu’ai-je à te voir sans chaussure ? ». Il répondit : « le prophète ﷺ nous commandait de nous mettre pieds nus des fois » ».

Comment donc, aurais-tu critiqué ce sahabi pour le fait que, malgré les richesses dont il était gardien et malgré sûrement sa richesse personnelle, il se mettait pieds nus et avait les cheveux ébouriffés ? Il en était de même pour eux concernant le fait de porter la muraqa’ah ! Qui donc ne connaît pas l’histoire de sayyiduna ‘Umar, commandeur des musulmans, qui, malgré le déferlement des trésors de Chosroès, n’a cessé de porter des habits rapiécés ? Les rapports sur ce fait sont assez nombreux :

عن أنس قال : رأيت بين كتفي عمر أربع رقاع في قميصه

Selon Anas : « j’ai vu entre les épaules de ‘Umar quatorze morceaux rapiécés à son qamis »

De même :

عن أبي عثمان النهدي، قال: «  رأيت عمر بن الخطاب رضي الله عنه يطوف بالبيت، وعليه إزار، عليه اثنتا عشرة رقعة، إحداهن بأدم أحمر

Selon Abu ‘Uthman an Nahdiy : « j’ai vu ‘Umar ibn al Khattab en train de faire le tawaf autour de la maison (ka’bah). Il avait un izar sur lequel étaient douze morceaux rapiécés dont certains étaient en rouge foncé. »

De même :

عن زيد بن وهب قال: « رأيت عمر بن الخطاب خرج إلى السوق، وبيده الدّرّة، وعليه إزار فيه أربع عشرة رقعة بعضها من أدم

Selon Zayd ibn Wahb : « j’ai vu ‘Umar ibn al Khattab sortant vers le marché. Il avait un bâton à sa main et il portait un izar avec quatorze morceaux rapiécés entre. Certains morceaux étaient noirs »

Aussi :

عَنْ نَافِعٍ ، قَالَ : سَمِعْتُ ابْنَ عُمَرَ ، يَقُولُ : وَاللَّهِ مَا شَمَلَ النَّبِيَّ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ ، فِي بَيْتِهِ وَلا خَارَجَ مِنْهُ ثَلاثَةُ أَثْوَابٍ ، وَلا شَمَلَ أَبَا بَكْرٍ فِي بَيْتِهِ وَلا خَارَجَ عَنْهُ ثَلاثُ أَثْوَابٍ ، وَلا شَمَلَ عُمَرَ فِي بَيْتِهِ وَلا خَارَجَ عَنْهُ ثَلاثَةُ أَثْوَابٍ غَيْرَ أَنِّي كُنْتُ أَرَى كِسَاءَهُمْ إِذَا أَحْرَمُوا كَانَ لِكُلِّ وَاحِدٍ مِنْهُمْ مِئْزَرٌ وَمَشْمَلٌ لَعَلَّهَا كُلَّهَا بِثَمَنِ دِرْعِ أَحَدِكُمْ ، وَاللَّهِ لَقَدْ رَأَيْتُ النَّبِيَّ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ يَرْفَعُ ثَوْبَهُ ، وَرَأَيْتُ أَبَا بَكْرٍ تَخَلَّلَ الْعَبَاءَةَ وَرَأَيْتُ عُمَرَ يُرَقِّعُ جَيْبَهُ بِرِقَاعٍ مِنْ أَدَمٍ وَهُوَ أَمِيرُ الْمُؤْمِنِينَ ، وَإِنِّي أَعْرِفُ فِي وَقْتِي هَذَا مِنْ يُجِيزُ بِالْمِائَةِ وَلَوْ شِئْتُ لَقُلْتُ أَلْفًا

Selon Nafi’ : « J’ai entendu ibn ‘Umar dire : « Je jure par Allah, le prophète ﷺ n’avait pas plus de trois habits, que ce soit dans sa maison ou en dehors. Abu Bakr n’avait pas plus de trois habits que ce soit dans sa maison ou en dehors. ‘Umar n’avait pas plus de trois habits que ce soit dans sa maison ou en dehors. Sauf que je voyais leur manteau, quand ils entraient en ihram. Chacun d’eux avait un izar et un manteau qui valaient à tous le prix d’un habit de l’un d’entre vous. Je jure par Allah, j’ai vu le messager d’Allah ﷺ rapiécer son vêtement. J’ai vu Abu Bakr alors que son manteau était troué. J’ai vu ‘Umar rapiécer sa poche avec des morceaux de peau alors qu’il était commandeur des croyants. Et je connais, dans cette époque, des gens qui se permettent de s’habiller d’un habit de cent, et je pourrais même dire mille si je voulais » »

De sorte, tu vois bien qu’ils avaient préféré les habits rapiécés alors qu’ils avaient le choix d’un autre habit, tout simplement par amour de la pauvreté, de l’ascétisme et de la mise sans valeur ? Or, tu trouveras que nombre de sahaba avaient adopté cette voie. Dans le Musannaf de Ibn Abi Shaybah, il est rapporté selon ‘Urwah ibn Zubayr :

قَالَ : كَانَتْ عَائِشَةُ  » تَقْسِمُ سَبْعِينَ أَلْفًا وَهِيَ تُرَقِّعُ دِرْعَهَا

‘Aishah distribuait soixante dix mille (dinar) alors qu’elle rapiéçait son habit

Dans les Tabaqat de Ibn Sa’d, ‘Amru ibn Qays a dit :

أن عليا رئي عليه إزار مرقوع فقيل له فقال يخشع القلب ويقتدي به المؤمن

On a vu ‘Aliy portant un izar rapiécé et on le lui fit remarquer. Il dit : « cela donne de la crainte au cœur et le croyant suit cet exemple ».

Ne vois-tu pas que sayyiduna ‘Ali t’a demandé de te vêtir de la muraqa’ah, en suivant son exemple ? Ne vois-tu pas que le port de la muraqa’ah était la sunnah des salaf ? Et si tu prétends que la sunnah demande de montrer les bienfaits d’Allah sur sa personne, on te répondra :

أَفَتُؤْمِنُونَ بِبَعْضِ الْكِتَابِ وَتَكْفُرُونَ بِبَعْضٍ

« croirez-vous en une partie du livre et mécroirez-vous à une autre partie ? »

En effet, ceux qui ont choisi l’embellissement suivent une sunnah de même que ceux qui ont choisi la pauvreté de vêtement. Or, par consensus des gens du Tassawuf, comme l’a rappelé al Ghazaliy, la voie de la pauvreté est la meilleure ! Et si tu crois que ce hadith est un alibi pour délaisser la pauvreté de vêtement, c’est que ta vision intérieure est définitivement obstruée. Regarde donc comment l’imam du Tassawuf et le parangon du Salaf, Hassan al Basriy a l’a compris et comment il préférait les habits vils :

وقال له رجل يومًا: يا أبا سعيد، أيُّ اللباس أحب إليك؟ قال: أغلظه، وأخشنه، وأوضعه عند الناس، فقال الرجل: أليس قد روي: ((إن الله جميل يحب الجمال فقال: يا بن أخي، لقد ذهبت إلى غير المذهب، لو كان الجمال عند الله اللباس، لكان الفُجَّار إذًا عنده أوجه من الأبرار، إنما الجمال: التقرب إلى الله بعمل الطاعات، ومُجانبة المعاصي، ومكارم الأخلاق ومحاسنها

« Un homme lui dit un jour : « O Abu Sa’id, quel habit est le plus aimé pour toi ? » IL dit : « le plus vil, le plus rustre et le plus déprécié parmi les gens. » L’homme lui dit : « N’a-t-il pas été rapporté : « Allah est beau et aime la beauté » ?Il répondit : « O mon cousin ! tu t’es égaré du bon chemin. Si la beauté auprès d’Allah était en fait de vêtement, les dépravés seraient donc plus appréciés auprès de Lui que les bons ! La beauté est le fait de s’approcher d’Allah par les actes d’obéissance, d’éviter les péchés, d’avoir les bons caractères et qualités. » »

O Ben Aissa, qu’aurais-tu dit si tu avais vu le prophète ﷺ ainsi que ‘Umar, ‘Ali et Mus’ab, porter une muraqa’ah ? Les aurais-tu, O toi l’impertinent, les aurais-tu traités de clowns ?

Ou même aurais-tu insulté de même les grands awliya de la Ummah comme Abdul Qadir al jilaniy qui était connu comme un porteur de muraqa’ah, caractéristique qu’ont retenu les gens du Maghrib en le surnommant « Bou Derbalah » ? La réalité est que les gens n’aiment de la sunnah que ce qui apaise leur nafs. De sorte, toute chose, même venant de la sunnah, qui leur rappelle leur faiblesse dans ce suivi est pour eux une attaque. Ils se sentent dès lors l’obligation de déprécier celui qui suit cette sunnah par confort, par rejet que l’on puisse faire ce qu’ eux ne se sentent point le courage de faire. Notre Seigneur a dit dans ce sens :

وَرَفَعْنَا بَعْضَهُمْ فَوْقَ بَعْضٍ دَرَجَاتٍ لِيَتَّخِذَ بَعْضُهُم بَعْضاً سُخْرِيّاً

« Nous avons élevé certains par rapport à d’autres en degrés pour qu’ils se prennent l’un l’autre comme sujet de moquerie »

Il a dit aussi :

وَقَالَ الَّذِينَ كَفَرُوا لِلَّذِينَ آمَنُوا لَوْ كَانَ خَيْراً مَّا سَبَقُونَا إِلَيْهِ وَإِذْ لَمْ يَهْتَدُوا بِهِ فَسَيَقُولُونَ هَذَا إِفْكٌ قَدِيمٌ

« Ceux qui ont mécru ont dit à ceux qui ont cru : « si cela avait été du bien, ils ne nous auraient moins devancé » Et s’ils ne sont pas guidés vers cela, ils disent : « il s’agit d’un mensonge déjà vieux » »

C’est en observance de cela que les soufis ont adopté la muraqa’ah comme signe distinctif. Car en effet, la muraqa’ah est un des fondements de la voie des soufis.

La Muraqa’ah est un fondement dans la voie du Tassawuf

L’origine du mot Tassawuf est connu, malgré les divergences sur l’étymologie. Ce qui doit être retenu est que son origine est le mot صوف qui désigne la laine en arabe. Cette étymologie se comprend car, après la mort des sahaba, l’opulence a commencé à gagner les musulmans. Nombre ont coupé avec la vie ascétique héritée du temps du prophète ﷺ pour adopter de belles mises et une vie de richesses. Or, ceux qui ont voulu garder le mode de vie des Sahabas, à savoir les premiers soufis, se sont démarqués de ceux-là e adoptant une mise qui était misérable pour les musulmans de l’époque. Cet habit était fait de laine, d’où l’appellation de soufis. De plus, l’habit était constitué de pièces séparées, trouvées ça et là. De sorte, l’habit de laine était directement lié à l’habit rapiécé et la muraqa’ah est devenu le signe distinctif des soufis.

Ce qui le prouve est l’abondance des chaînes de transmission des muraqa’ah recueillies génération après génération, qui passent par des sahabah et les premiers parmi les soufis, à l’image de Hassan al Basri. Ainsi, l’imam Ibn al Jaziriy, le célèbre maître dans la récitation des dix lectures du coran, l’auteur de la jaziriyyah dans la science des lectures, a dit :

وأما لبس الخرقة، واتصالها بأمير المؤمنين علي كرم الله وجهه، فإني لبستها من جماعة، ووصلت إلي منه من طرق رجاء أن أكون في زمرة محبيه، وجملة مواليه يوم القيامة

« Quant au fait de porter l’habit rapiécé (khirqah) et d’en rapporter une chaîne jusqu’au commandeur de croyants ‘Ali,qu’Allah anoblisse son visage, je l’ai moi-même portée d’un groupe de chuyukh et j’en détiens une chaîne remontant à lui par de nombreuses voies, espérant être de son groupe, de ses bien-aimés et de ses serviteurs le jour de la résurrection. »

Après avoir rappelé nombre de ces riwayat remontant à sayyidina ‘Ali, l’imam al Jaziriy continue :

كذا وردت إلينا الخرقة من الحسن البصري عن علي بن أبي طالب بغير واسطة وأهل الحديث لا يعرفون للحسن البصري سماعا من علي مع أنه عاصره بلا شك فإنه ولد في خلافة عمر وصح أنه سمع خطبة عثمان رضي الله عنهما وأجمع مشايخ التصوف على أن الحسن البصري صحب علي بن أبي طالب ولبس منه والله أعلم وسألت شيخنا الحافظ إسماعيل بن كثير فقال لا يبعد أنه أخذ عنه بواسطة ولقيه له ممكن فإنه سمع عثمان بن عفان

« Ainsi nous a été rapporté l’habit rapiécé de ‘Ali ibn Abi Talib par Hassan al Basriy, sans aucun intermédiaire entre eux. Les gens du hadith ne reconnaissent pas à al Hassan al Basriy d’avoir entendu de ‘Ali malgré qu’ils soient contemporains sans aucun doute. Il est né durant la khilafah de ‘Umar et il est sûr qu’il a entendu la khutbah de ‘Uthman. Les chaykh du Tassawuf par contre sont unanimes pour dire que al Hassan a accompagné ‘Ali ibn Abi Talib et qu’il a porté l’habit rapiécé de sa main. J’ai interrogé à notre chaykh le hafiz Isma’il ibn Kathir et il a dit : « On ne peut pas écarter qu’il ait pris de lui par un intermédiaire et sa rencontre avec lui est possible. Il a certes entendu de ‘Uthman ibn ‘Affan » ».

O Ben Aissa, O toi le fat, ne vois-tu pas que ce chaykh, hafiz dans le hadith, fait remonter directement l’habit rapiécé à sayyidina ‘Ali en passant par le plus pieux de tous les tabi’in ? De même, ne vois-tu pas qu’il rapporte l’unanimité des chuyukh du Tassawuf sur l’attribution de cet habit à ‘Ali et qu’il l’a lui-même porté ? Vas-tu aussi les qualifier de clowns?

La muraqa’ah est sans conteste un fondement de la voie du Tassawuf et seul un ignorant comme toi de la sunnah et de la voie du Qawm oserait tenir les propos que tu as proférés.

Le chaykh de nos chuyukh, notre maître Mulay Muhammad al ‘Arabiy ad Darqawiy a dit dans ses Rasa’il:

فالسؤال و المرقغه كلاهما من طريق القوم رضي الله عنهم

« La mendicité ainsi que la muraqa’ah font toutes deux partie de la voie du Qawm, qu’Allah les ait en agrément ».

Vas-tu aussi dénigrer ce Qutb alors qu’il établit que la muraqa’ah est de la voie des gens du Tassawuf ? Si tu tiens les propos semblables à ceux que tu as tenus, c’est peut-être tout simplement que tu ne fais pas partie du Qawm, que tu n’as aucune part parmi les gens du Tassawuf !

Or, cette muraqa’ah est consignée, depuis les débuts de la science du Tassawuf, parmi les signes distinctifs des soufis. En effet, les premiers qui ont rédigé des traités et systématisé la science du Tassawuf l’ont marquée comme un symbole tiré de la sunnah dont les soufis se sont appropriés. Ainsi donc, al Hujwiriy, un des premiers à avoir rédigé un ouvrage sur les bases du Tassawuf à l’image de al Qushayriy, dans son célèbre kashf al mahjub dit, au chapitre traitant de la muraqa’ah:

« Sache que le port de la muraqa’ah est le signe du cheminant dans la voie du Tassawuf. Porter la muraqa’ah est une sunnah. De là le messager d’Allah ﷺ a dit : « Vous vous devez de porter la laine. Vous trouverez ainsi la douceur de la foi dans vos cœurs » ».

Un des compagnons a dit : « le prophète ﷺ portait de la laine et montait un âne ». Le messager d’Allah ﷺ a dit aussi à Aishah : « ne jette un habit qu’une fois que tu l’auras rapiécé ». Il a dit : « vous devez porter la laine pour atteindre la douceur de la foi »

Il est rapporté de ‘Umar qu’il avait une muraqa’ah composée de treize morceaux. Il fut rapporté aussi qu’il a dit : « le meilleur habit est celui qui cause moins de souci ». Il est rapporté aussi du commandeur de croyants ‘Ali qu’il avait un qamis dont les manches n’arrivaient pas à ses doigts. Quand il avait un qamis qui était plus long, il en coupait la manche.

Allah a certes ordonné à son messagerﷺ raccourcir ses vêtements dans Sa Parole : « Et tes habits, purifie-les ». Hassan al Basriy a dit : j’ai vu soixante parmi les combattants de Badr portant tous des vêtements en laine ». Le plus grand des véridiques (Abu Bakr) a certes porté un habit de laine quand il s’est mis dans un état de dépouillement. Hassan al Basriy a dit : « J’ai vu Salman (al farisi) alors qu’il portait un habit sans aucune valeur (kalim) avec nombre de rapiècements ».

Il a été rapporté de ‘Umar ibn al Khattab et de ‘Ali ibn Abi Talib ainsi que Hazm ibn Hayyan qu’ils ont vu Uways al Qaraniy alors qu’il portait un habit en laine qui était rapiécé de toutes parts. Hassan al Basriy, Malik ibn Dinar, Sufyan ath Thawriy étaient tous des gens qui portaient la muraqa’ah des soufis.

Il a été rapporté du plus grand imam Abu Hanifah – et ceci est consigné dans le livre tarikh mashayikh qu’a écrit Muhammad ibn ‘Ali at Tirmidhiy – qu’il portait d’abord de la laine et voulait s’isoler jusqu’à ce qu’il voie le messager d’Allah ﷺ dans un rêve lui dire : « tu dois être parmi les gens car tu seras la cause de la revivification de ma sunnah ». Dès lors, il arrêta de s’isoler. Jamais pourtant il ne portait d’habit cher. Dawud at Tâ’iy demandait de portait l’habit de laine et il était parmi les soufis accomplis.

Ibrahim Ibn Adham vint à Abu Hanifah alors qu’il portait une muraqa’ah en laine et les compagnons de Abu Hanifah le regardèrent avec mépris. Abu Hanifah dit alors : « notre maître Ibrahim ibn Adham est venu ». Ses compagnons lui dirent : « L’imam des musulmans ne doit pas blaguer ainsi ! Où lui trouves-tu une qualité de maître ? » Il répondit : « Par le fait qu’il reste en permanence dans le service. Il s’est occupé du service d’Allah alors que nous nous sommes occupés du service de nos nafs jusqu’à ce qu’elle devienne notre maître ».

Si l’objectif de certaines gens de cette époque en portant la muraqa’ah est de chercher la dignité ainsi que l’embellissement devant les gens, et que ce qui se trouve dans leur cœur n’est pas en accord avec leur extérieur, il est concevable que dans chaque armée ne se trouve qu’un seul être remarquable. Les hommes accomplis sont peu nombreux dans tout groupe bien que tous se réclament de ce groupe du fait qu’ils ont quelque ressemblance dans leurs règles en référence à sa parole ﷺ : « quiconque imite un peuple en fait partie ». Cela veut que quiconque se lie à un peuple le fait par les actes ou les croyances. Mais une partie porte attention à la forme des soufis et à l’apparence de leurs actions. Une autre partie porte attention à leur secret et à la pureté de leur intérieur. […]

Les machayikh de cette voie ont ordonné aux aspirants de se parer de la muraqa’ah et de s’embellir par elle. Eux-mêmes ont agi ainsi pour qu’elle soit pour eux un signe distinctif parmi la créature. De sorte, les créatures les surveilleront de prêt. S’ils font un pas de travers, la langue des gens les blâmera sans complaisance. S’ils veulent commettre un péché dans cet habit, ils ne pourront point de peur de se faire remarquer par les créatures.

En résumé, la muraqa’ah est la parure des awliya d’Allah. Les gens du commun sont honorés par elle et ceux de l’élite rabaissés. L’honneur donné aux gens du commun est qu’ils sont sacralisés par la création quand ils la portent. Le rabaissement des gens de l’élite est qu’ils sont regardés par la création comme des gens du commun et ils les blâment pour cela quand ils le portent. C’est pour quoi elle est « l’habit des bienfaits pour les gens du commun, et la source des épreuves pour les gens de l’élite ». En effet, la plupart des gens du commun sont obligés d’y recourir quand ils sont incapables d’accomplir d’autres actes. Elle ne peut être pour eux un moyen de chercher la gloire ou de chercher le pouvoir. Elle devient pour eux un moyen donc d’obtenir les bienfaits spirituels. Les gens de l’élite devront délaisser le pouvoir et préférer l’abaissement à l’élévation et cet habit sera pour eux une preuve et pour ces autres un bienfait . « La muraqa’ah est l’habit de fidélité des gens de la pureté, ainsi que le vêtement de la félicité pour les gens de l’illusion ». De sorte, les gens de la pureté se dépouillent par son port des deux mondes. Ils coupent tout lien par elle avec les habitudes. Par elle, les gens de l’illusion sont voilés de la vérité et se coupent ainsi du bien. »

Il dit de même :

« Quant à la condition de la muraqa’ah, c’est que le soufi la fabrique dans le but de s’alléger et de se vider. Chaque fois que se déchire un endroit, il devra y rajouter un morceau rapiécé.

Les mashayikh ont sur cela deux positions. Un groupe déclare qu’il n’est pas conditionné de respecter un ordre particulier pour mettre le morceau rapiécé. Il est donc recommandé de coudre à n’importe quel endroit que se fait la déchirure, sans faire attention (à l’ordre).

Un autre groupe dit que la couture des morceaux rapiécés est conditionnée à un ordre défini et bien agencé ainsi qu’au respect d’une forme et qu’il faut prêter attention à l’agencement. En effet, elle est l’outil dont se servent les fuqara. La bonne présentation de l’outil est la preuve de la bonne présentation du fondement.

J’ai moi-même, ‘Ali ibn ‘Uthman al Jalabiy, demandé au chaykh des machayikh, Abul Qasim al Jurjaniy, de Tus : « que faut-il au minimum au faqir pour qu’il soit digne du nom de faqir ? ». Il dit « Il lui faut trois choses au minimum :

  • en premier, il doit savoir comment coudre sa muraqa’ah dans une forme agencée
  • en second, il doit connaître comment écouter une parole avec rectitude
  • en troisième, il doit savoir comment marcher sur terre avec un pied droit

Quand retournâmes au couvent, les autres qui étaient présents parmi les derviches quand il avait dit cela ainsi que moi-même, chacun parmi eux se mit à accomplir cela. Une partie d’entre eux manifesta le mal et se mit à dire : « la pauvreté réelle est ainsi ». La plupart d’entre eux se pressait à embellir la couture de leur muraqa’ah ainsi qu’à la bonne marche sur terre et chacun d’eux pensait en lui-même qu’il savait écouter avec rectitude dans la voie. Il se fit que mon cœur pencha vers ce maître et je n’acceptais pas que sa parole soit prise à la légère. Je dis donc : « Venez que chacun dise quelque chose sur cette parole ». Chacun d’entre eux dit son opinion et quand mon tout vint, je dis : « La muraqa’ah bien agencée et que le faqir la couse pour la pauvreté et non l’embellissement. Si elle est cousue pour la pauvreté, elle est bien agencée même si elle n’est pas comme cela en apparence. Ecouter une parole avec rectitude est de l’écouter avec son état et non avec attention, qui est appliquée avec rigueur et non par jeu et qui est comprise par le ruh et non la raison. Le pied droit est celui qui est posé sur terre par ivresse et non par jeu ou juste par apparence. »

Quand on rapporta cette parole au chaykh, il dit : « ‘Ali a vu juste, qu’Allah l’améliore ».

Le but dans le fait de porter la muraqa’ah pour ce groupe est de sentir le poids du bas-monde et de réaliser la pauvreté en Allah. Il a été rapporté dans des récits authentiques que ‘Isa ibn Maryam ﷺportait une muraqa’ah quand il a été élevé au ciel. Un des chaykh a dit : « j’ai vu ‘Isa ﷺ dans un rêve et il portait cette muraqa’ah en laine. De chaque morceau rapiécé, brillait de la lumière. Je dis : « O toi le messie, que sont ces lumières sur ton habit ? » Il dit : « Ce sont les lumières de mes peines. J’ai cousu chaque morceau pour une peine endurée. Allah a transformé chaque mal qui m’a touché en lumière » ».

Il dit de même :

« Le but dans le fait que la plupart de leurs habits soient bleus est qu’ils ont construit leur voie sur le fait de voyager et d’errer sur terre. Le vêtement blanc ne reste pas dans son état premier lors d’un voyage et son lavage devient dur et que tout le monde le convoite. Le fait de porter du bleu est le signe des gens de la mort et des malheurs. Il s’agit pour les gens de l’habit de la tristesse et certes, le bas-monde est la demeure de l’épreuve et l’endroit du malheur et des tristesses, des épreuves et des catastrophes. Quand les murid ont vu qu’ils n’atteindront point leurs objectifs dans ce bas-monde, ils se sont vêtus de bleu et se sont assis pour accomplir l’Arrivée à Allah. »

Il dit :

« La muraqa’ah est l’habit qui regroupe toutes les stations de la voie, de la pauvreté et de la pureté. Délaisser de cet habit et l’abandonner est comme abandonner toute la voie ».

Il dit enfin :

« La muraqa’ah est le signe des pieux, l’étendard des bienheureux, l’habit des fuqara et des aspirants au Tassawuf »

Certes, il n’y a plus rien à rajouter ! Le maître al Hujwiriy a balayé toute velléité de rébellion dans le cœur de tout doué d’esprit sur la muraqa’ah. Ne vois-tu donc pas qu’il rapporte la sunnah des salafs ainsi que des premiers chuyukh parmi les soufis ? O toi Ben Aissa, que vas-tu dire, vas-tu aussi traiter les premiers soufis de clowns alors qu’ils portaient des habits volontairement rapiécés, des muraqa’at de couleur qui plus est, dont les morceaux étaient parfaitement agencés et cousues ? N’est ce pas cette même muraqa’ah que portent les karkaris ? Se pose la question donc, si tu avais été à l’époque de ces salafs et de ces imams du Tassawuf, aurais-tu été de leurs suivants ou aurais-tu été de ceux qui les insultent et les traitent d’égarés ? La réponse est claire, tu n’as pas besoin de la formuler. Tes paroles t’ont trahi car tu as traité les karkaris ne clowns alors qu’ils n’arboraient que les signes distinctifs des soufis, les muraqa’ah de couleur telles qu’en portaient les premiers soufis. En réalité, ta parole est une preuve contre toi car, aujourd’hui tu t’es montré ennemi d’un wali d’Allah, jadis tu aurais exactement agi de la même manière et aurais été des ennemis d’al Ghazaliy ou de Abdul Qadir al Jilaniy. Réfléchis donc à cela, cela vaut matière à réfléchir au lieu de calomnier ceux qui peut-être devant Allah valent mieux que toi !

Réfutation de quelques ambiguïtés

Les détracteurs de la Karkariya, comme d’habitude à court d’arguments, ont attaqué la muraqa’ah sur des aspects qui sont pourtant connus de tous et qui tombent sous le sens.

Ils ont prétendu en premier lieu que la muraqa’ah des soufis d’antan n’était pas en couleur. Ceci est une ignorance effrontée et seul un malhonnête ou un béotien peut tenir de tels propos.

En effet, Ibn ‘Ajibah al Hassaniy a dit, en commentant les paroles de Ibn Bannah dans al Futuhat al ilahiyyah :

المرقعة و هي ثوب الملفق من رقاع كثيرة ملونة او غير ملونة

« La muraqa’h est un habit collé morceau par morceau, qu’il soit coloré ou non. »

O toi le blâmeur, as-tu donc perdu ton esprit critique ? Al Hujwiriy que nous avons déjà cité indique que les premiers parmi les soufis choisissaient des couleurs spécifiques pour la muraqa’ah ! Cela ne suffit-il pas, si tu te réclames de ahlus sunnah et du Tassawuf d’al Junayd ?

Une autre objection fallacieuse est que soufis qui nous ont précédés ne portaient de muraqa’ah qu’après que leurs habits neufs aient été usés. A cela nous répondons que votre connaissance de la sunnah est insignifiante. En effet, ne vois-tu pas que le prophèteﷺ a porté un habit rapiécé qui était fait spécialement du Yemen ? Dans mawwahibb al laduniyyah, le maître al Qastallaniy dit :

و عن انس قال: كان رسول الله ﷺ يلبس الصوف و كان له كساء ملبد يلبسه و يقول « انما ابا عبد البس كما يلبس العبد »

فان قلت قد علم من هذا و من سيرة السلف الصالح بذاذة الهيئة و رثاثة الملابس، فما بال الشاذلية من الصوفية يجملون هيآتهم و ملابسهم و طريقتهم الاقتداء بالسنة الشريفة و السلف الصالح.

اجاب العارف الرباني علي الوفائي اذاقنا الله حلاوة مشربه و من خطه الكريم نقلت بما لفظه: ذلك بانهم نظرو الي المعاني و الحكم. فوجدو السلف الصالح لما وجدو اهل الغفلة و الشغل لدنياهم منهمكين علي الزينة الظاهرة تفاخرا بدنياهم و اطمئنانا اليها و اشعارا بانهم من اهلها، خالفوهم اظهارا لحقارة ما حقره الحق مما عظمه الغافلون بالغني عما افقر نفسه اليه من همة دنياه. فلما طال الامد و قست القلوب بنسيان ذلك المعني، و اتخذ الغافلون رثاثة الاطمار و بذاذة الهيئة حلية علي جلب دنياهم انعكس الامر. فصار مخالفة هؤلاء في ذلك هو قول السلف و طريقتهم كما تقدم

Selon Anas : « le messager d’Allah ﷺ s’habillait en laine. Il avait un manteau rapiécé qu’il portait et disait : « je suis un serviteur et je m’habille comme un serviteur »

Si tu dis : « nous savons de cela ainsi que de la vie des salaf pieux qu’ils préféraient la pauvreté d’apparence ainsi que de se vêtir de haillons. Que dire donc des shadhilis parmi les soufis qui embellissent leur apparence et leurs vêtements alors que leur voie est le suivi de la sunnah noble ainsi que des pieux salaf ? »

A répondu à cela le connaissant seigneurial, ‘Ali al Wafa’iy, qu’Allah nous fasse goûter à la saveur de son abreuvoir, et de sa main, a été rapportée cette réponse : « Ceci parce qu’ils ont observé les sens profonds ainsi qu’à la règle qui y affère. Ils ont trouvé que les salaf pieux, quand ils ont vu que les gens de l’insouciance et de l’occupation du bas-monde étaient noyés dans l’embellissement de l’apparence tout en se montrant fiers de leur bas-monde et se sentant apaisés dedans et exhibant le fait qu’ils sont de ses gens, les pieux salaf les ont contredits. Ils les ont contredits en faisant montre de mépris pour ce qu’a méprisé le Vrai alors que les insouciants l’avaient honoré par la richesse au lieu de ce dont avait besoin leur personne strictement par amour du bas-monde. Une fois que le temps s’écoula et que les cœurs furent durs par l’oubli de ce sens profond, les insouciants prirent les haillons parmi les vêtements ainsi que la pauvreté de l’apparence comme une parure pour apprivoiser le bas-monde et alors, la chose devint différente. Se différencier d’eux (par l’embellissement) est devenu l’opinion des salaf ainsi que leur voie »

De cette parole du chaykh de nos chuyukh, notre maître ‘Ali ibn al Wafa’, l’on comprend bel et bien que la muraqa’ah était l’habit habituel des soufis à cette époque et que, pour un soufi, ne pas porter la muraqa’ah était une action incongrue. D’où d’ailleurs l’intérêt de la mise à jour de cette sunnah des awliya, magnifié par le but mentionné par notre chaykh ‘Ali ibn al Wafa’, celui de se désolidariser de ceux qui se sont enfoncés dans le bas-monde. Or, si la pauvreté d’apparence était devenue un moyen de chercher le bas-monde aux temps de ce chaykh, il n’en est assurément pas ainsi à cette époque où même l’usage de la muraqa’ah s’est perdue et que nous sommes obligé d’écrire une réfutation pour prouver qu’elle est de la voie des soufis authentiques.

Le fait donc que cette muraqa’ah était spécialement faite par les soufis n’a même pas besoin d’être prouvé, tellement qu’elle tombe sous le sens. Le fait qu’un chaykh donnait spécifiquement la muraqa’ah à son disciple montre bien qu’il ne s’agit nullement d’un habit qui a été porté et s’est usé. Pour s’en convaincre définitivement, tu sauras que certains parmi les savants ont désapprouvé le fait que les soufis arborent cet habit de prime abord. Ainsi ibn al Jawziy a dit dans talbis Iblis :

لما سمع أوائل القوم أن النبي صلى الله عليه وسلم كان يرقع ثوبه وأنه قال لعائشة رضي الله عنها: [ لا تخلعي ثوبا حتى ترقعيه ] وأن عمر بن الخطاب رضي الله عنه كان في ثوبه رقاع وأن أويسا القرني كان يلتقط الرقاع من المزابل فيغسلها في الفرات ثم يخيطها فيلبسها اختاروا المرقعات

Quand les premiers parmi les gens du Qawm entendirent que le prophète ﷺ rapiéçait ses vêtements et qu’il a dit à Aishah : « ne jette un habit qu’après l’avoir rapiécé » et que ‘Umar ibn al Khattab avait à son habit des morceaux rapiécés et que Uways al Qaraniy ramassait des morceaux des dépotoirs qu’il lavait dans l’Euphrate, cousait et portait, ils ont choisi donc les habits rapiécés.

Il dit de même :

فأما الصوفية زماننا فإنهم يعمدون إلى ثوبين أو ثلاثة كل واحد منها على لون فيجعلوها خرقا ويلفقونها فيجمع ذلك الثوب وصفين الشهرة والشهوة فإن لبس مثل هذه المرقعات أشهى عند خلق كثير من الديباج وبها يشتهر صاحبها أنه من الزهاد أفتراهم يصيرون بصورة الرقاع كالسلف

« Quant aux soufis de notre époque, ils font exprès de prendre deux ou trois habits de couleur différente qu’ils rapiècent et collent ensemble. Par cet habit, ils regroupent les deux caractères de la célébrité et de la passion. En effet, porter ces habits rapiécés fait naître plus de passion auprès des gens que le brocart dans le sens où son porteur se démarque en faisant penser qu’il est ascète, essayant d’imiter en cela le rapiècement des salaf »

Or, il est clair que ibn al Jawziy rapporte ici deux faits qui méritent qu’on s’y arrête. Il confirme d’abord que le rapiècement était une habitude du prophète ﷺ et des sahaba. Il donne aussi l’information que les soufis de son époque, à savoir au sixième siècle, rapiéçaient volontairement leurs habits pour suivre en cela les salaf.

Quant à l’argument de la célébrité, nous y répondrons infra.Or, cette parole ne doit point cacher la réalité, à savoir que les compagnons ont volontairement rapiécé leurs habits. En effet, il est rapporté de sayyiduna ‘Ali :

أن عليا رئي عليه إزار مرقوع فقيل له فقال يخشع القلب ويقتدي به المؤمن

« On a vu ‘Aliy portant un izar rapiécé et on le lui fit remarquer. Il dit : « cela donne de la crainte au cœur et le croyant suit cet exemple » »

Pourquoi donc voulait-il donner l’exemple à ses contemporains si le rapiècement n’était pas volontaire ? Si le port de l’habit rapiécé n’était pas volontaire, comme le prétendent ces malhonnêtes, pourquoi donc ‘Umar ibn al Khattab en portait un alors qu’il était à la tête de l’Etat le plus puissant du monde ?

عن أبي عثمان النهدي، قال:  » رأيت عمر بن الخطاب رضي الله عنه يطوف بالبيت، وعليه إزار، عليه6 اثنتا عشرة رقعة، إحداهن بأدم أحمر

Selon Abu ‘Uthman an Nahdiy : « j’ai vu ‘Umar ibn al Khattab en train de faire le tawaf autour de la maison (ka’bah). Il avait un izar sur lequel étaient douze morceaux rapiécés dont certains étaient en rouge foncé. »

Or, si tu cherches la vérité, elle t’a été clairement exposée. Si tu cherches par contre des esquives pour ne point l’accepter, sache que mille preuves ne convaincront jamais le rétif.

قد تنكر العين ضوء الشّمس من رمد … وينكر الفم طعم الماء من سقم

Il se peut que l’œil réfute la lumière du soleil par cécité
et que la bouche réfute le goût de l’eau par maladie

Une autre esquive trouvée par les détracteurs est de dire que la muraqa’ah est un habit de célébrité, un habit de shuhrah comme cela est connu dans le fiqh. Nous répondons à cela : es-tu plus pieux que les imams qui l’ont tous porté, comme ‘Umar, ‘Ali, Abu Dhar, Hassan al Basriy, Ibrahim ibn Adham, al Ghazaliy, Abdul Qadir al Jilaniy… alors que leurs contemporains soignaient leurs mises pour ce bas-monde où s’arrête toute leur convoitise ? Pourquoi ne dis-tu pas d’eux qu’ils portaient un habit de célébrité, les classant donc parmi les pécheurs, alors qu’il est clairement établi que seuls les soufis s’habillaient de cette manière ? Ou bien ta volonté de défendre l’Islam et la sunnah n’est-elle excitée que quand il est question des karkaris ? Pourquoi donc n’as-tu pas eu la même parole pour Hassan al Basriy de qui est rapporté :

: يا أبا سعيد، أيُّ اللباس أحب إليك؟ قال: أغلظه، وأخشنه، وأوضعه عند الناس

Un homme lui dit un jour : « O Abu Sa’id, quel habit est le plus aimé pour toi ? » IL dit : « le plus vil, le plus rustre et le plus déprécié parmi les gens. » »

Pourquoi n’as-tu pas dit la même chose pour les premiers soufis qui s’habillaient sans exception de laine, différemment des gens de leur époque ?

Nous disons qu’effectivement l’imam Malik a détesté le fait de porter un habit qui soit différent de ceux de ses contemporains. Dans al ‘Utbiyah :

وسئل الإمام مالك عن اللباس الخشن من الصوف فقال (( لا خير في الشهرة ، وينبغي أن يخفي الإنسان عمله

« On interrogea Malik sur le port d’un habit en laine rêche et il dit : « Il n’y a pas de bien dans la célébrité. Il convient que l’homme cache son action. » »

Or, tu sauras que la muraqa’ah ne peut en aucun cas devenir un habit de célébrité. En effet, l’habit rapiécé a été porté par le prophète ﷺ comme l’ont rapporté tous les spécialistes des siyar en se basant sur les hadiths rapportés dans les deux sahih. Il a de même été porté par nombre des sahaba. De sorte, cet habit, même s’il était abandonné par tous les musulmans et qu’un petit nombre seulement le porte ou encore pire, que les gens de l’innovation le prennent tous comme signe distinctif, il n’en resterait pas moins un habit provenant de la sunnah que le musulman peut porter par imitation du prophète ﷺ. Ne vois-tu pas que le turban n’est jamais considéré comme un habit de célébrité, ainsi que le qamis sauf s’ils sont d’une dimension exagérée ? Or, la majorité des musulmans a cessé de porter habituellement le turban et celui-ci est devenu un signe distinctif de certains mécréants comme les sikhs. Si la muraqa’ah est un habit de célébrité, que dire donc de celui qui arbore les habits distinctifs comme le qamis, le turban et autres dans des pays où cela n’est plus l’habitude ? Notre maître le chaykh ibn al Marzuq a dit dans mi’yar al mu’rib :

لا يجوز ترك السنن لمشاركة المبتدعين فيها، اذ لا يترك الحق لاجل الباطل. و ما زال العلماء و الصالحون يقيمون السنن مع العلم بمشاركة المبتدعين

« Il n’est pas permis de délaisser une sunnah par prétexte que les innovateurs l’accomplissent aussi. En effet, on ne délaisse pas la vérité en considération du faux. Les savants et les pieux n’ont cessé d’accomplir les sunan tout en sachant que les innovateurs les accomplissent également. »

Si cela est vrai pour l’accomplissement d’une sunnah par les innovateurs, qu’en est-il alors de ceux qui font revivre une sunnah parmi les sunan du prophète ﷺ ? N’a-t-il point dit, même si le degré de ce hadith est faible :

مَنْ أَحْيَا سُنَّتِي فَقَدْ أَحَبَّنِي وَمَنْ أَحَبَّنِي كَانَ مَعِي فِي اَلْجَنَّةِ

« Celui qui fait revivre ma sunnah m’aura aimé. Et quiconque m’aime sera avec moi au paradis ».

Dans les Nawazi de al Burzuliyl, le chaykh ‘Izz ad Din ibn ‘Abdis Salam fut interrogé sur le fait de porter les habits spécifiques des savants ou des pieux. Cela peut-il devenir dans ce cas un habit de célébrité ? Il répondit :

المتزي بلباس الصالحين ان كان قويا لا يخشي علي نفسه الفتنة و الرياء فلا يتركه كما لا يترك غيره من الصالحين و ان يخشي علي نفسه الفتنة و الرياء، فيترك ذلك. و لا فرق بين من عرف بالصلاح و لا بين من لم يعرف به

« Celui qui s’habille avec les habits des pieux, s’il est fort et ne craint pas pour lui la tentation ainsi que l’ostentation, il ne doit point le délaisser de même que ne doit pas le délaisser autrui parmi les pieux. S’il craint pour lui la tentation et l’ostentation, il devra le délaisser. Il n’y a en cela pas de différence pour celui qui est connu pour son bien et celui qui n’est pas connu pour cela. »

Al Burzuliy a dit quant à lui :

و اختلف السلف في لباس الرفيع من الثياب او الدني. فكان القاسم بن محمد يلبس الخزّ و كان سالم يلبس الصوف و لا يعيب احدهما علي صاحبه. و كان الحلفاء الراشدون لا يلبسون الخزّ لانه بعيد من الزهد و داع الي الزهد. ففي الموطأ ان عمر كان يلبس ثوبا قد رقع بين كتفيه برقاع ثلاث لبّد بعضها فوق بعض و هو امير المؤمنين

« les salaf ont divergé sur le fait de porter des habits chers ou bien vils. Al Qasim ibn Muhammad portait du khaz (du coton mélangé à de la soie) alors que Salim portait de la laine sans qu’aucun ne se sente supérieur à son compagnon. Les califes bien-guidés ne portaient pas de khazz car cela est éloigné de l’ascétisme et incite à la vanité. Dans al Muwatta’, il est rapporté que ‘Umar portait un habit qui avait été rapiécé entre les épaules avec trois morceaux collés l’un sur l’autre ».

Il dit ensuite :

و من هذه الآثار اخذت المتصوفة لباس الخرقة و التزي بزيهم و هي المسماة بالمرقعة. و قد رواه جماعة من المتأخرين مثل الشيخ ابي العباس بن ادريس البخاري. و اخذها عنه بعض التونسيين، و الشيخ ابو المحاسن يوسف العجمي بالديار المصرية و اخذها جماعة عنه. و قد ورد علينا في حدود عام 763 الشيخ عبد الرحمن الاندلسي و كان من اصحاب العجمي المذكور فاخذ عنه الخرقة صاحبنا الاخ الصالح ابو عبد الله الجريدي كساء مرقعة و رأسا مرقعا و كساء

« En conformité avec ces différents rapports des compagnons, les soufis ont adopté l’habit rapiécé (khirqah) et l’ont pris comme costume distinctif et cet habit est dit muraqa’ah. Cette muraqa’ah a été rapportée par tout un groupe parmi les ultérieurs comme le shaykh Abu ‘Abbas ibn Idris al Bukhariy qui l’a prise lui-même de certains tunisiens. De même le chaykh Abul Mahasin Yusuf al ‘Ajamiy d’Egypte l’a pris d’un groupe de shuyukh. Le chaykh ‘Abdur Rahman al Andalusiy nous a rapporté personnellement en l’année 763 à peu près, alors qu’il était un compagnon du chaykh al ‘Ajamiy déjà cité, qu’il a pris de lui l’habit rapiécé. Nous avons pris du frère pieux Abu ‘Abd Allah al Jaridiy un habit rapiécé ainsi qu’une cape rapiécée »

Il dit de même, O toi l’intelligent, écoute sa parole !

و اما ما انكره من لباس المتصوفة فهو ترهب الفقهاء و تقدمت الاشارة اليه من كلام عز الدين. و لا شك انه مكروه اذا ادي الي الشهرة. و اما ما لم يؤد اليها فمذهب المتصوفة الجواز. و لهم سند في لباس الخرقة المرقعة من طريقة الحسن البصري عن علي

« Quant à ce qui a été détesté de l’habit des soufis, il s’agit juste d’une mise en garde des savants. Nous avons déjà indiqué cela dans la parole de ‘Izz ad din. Il n’y a point de doute que cela est détesté si cela engendre de l’ostentation. Quant à ce qui ne l’engendre pas, ce qui est dans la voie des soufis est permis. Ils ont une chaîne dans le fait de porter la muraqa’ah par la voie de Hassan al Basriy selon ‘Aliy. »

Réfléchis donc à cela !

Sur la parole du menteur Ben Aissa concernant le prix de la muraqa’ah

Ben Aissa, après avoir étalé son ignorance sur la place publique alors qu’Allah l’avait couvert, s’est départi aussi du voile qu’Allah mettait sur l’état de son cœur et de ses péchés. En effet, piqué par son propre nafs, il s’est mis à mentir sans vergogne, à diffamer et à calomnier. Après avoir affirmé de prime abord n’avoir jamais visité un seul karkari, il prétend ensuite que la muraqa’ah que portent les karkaris coûte cinq cents (500) dollars américains. Nous avons cru un instant avoir mal entendu et qu’il parlait peut-être de dollars canadiens. Ne connaissant point le cours de cette monnaie, nous nous sommes dit qu’elle devait avoisiner celui du dirham marocain et que peut-être ce triste personnage ne mentait pas et qu’il se trompait seulement de quelques dizaines de dollars. Or, nous avons vérifié et le dollar canadien est à mille lieues du dirham marocain dans son change. De plus, il parlait bel et bien de dollars américains.

Sans faillir, il prétend ensuite qu’il a des informations sûres et qu’il a fait des investigations qui lui ont donné cette connaissance.

O Ben Aissa, pourquoi ne t’es-tu pas tu depuis le début ? Pourquoi as-tu voulu étaler devant l’humanité entière ton péché de calomniateur et de menteur qu’Allah avait caché jusqu’ici ? Pourquoi donc as-tu voulu, pour quelques applaudissements, dévoiler la réalité de tes péchés et de ton cœur ?

Car, tout le monde le sait, tu mens sans aucun doute. Aucun esprit sain ne peut accepter les balivernes et mensonges que tu as racontés. Cette muraqa’ah que portent les karkaris est un habit cousu à la main par un faqir, qui lui-même est étudiant ! Si la muraqa’ah coûtait réellement 500 dollars comme tu le prétends calomnieusement, il aurait arrêté ses études depuis belle lurette pour subvenir aux besoins de ses parents qui sont dans le besoin en se faisant tailleur!

Pourquoi mens-tu, Ben Aissa ? Pourquoi prétends-tu détenir des preuves solides de tes élucubrations ? Nous les attendons tes preuves, ramène-les donc ! Ramène-les et nous serons tout ouïe à t’écouter.

Or, je jure par Allah, jamais tu ne ramèneras une telle preuve car ce que tu as dit est un mensonge éhonté. Le mensonge ne sied pas à un musulman, faudra t-il te le rappeler, O Hamdi, alors que tu prétends donner « l’assistance spirituelle » ? Assiste ta propre personne ainsi que ta langue à ne pas récolter des péchés par les mensonges qu’elle profère. Certes, tout musulman connaît la teneur des hadiths sur l’interdiction du mensonge et de la calomnie :

عن عائشة أن رسول الله صلى الله عليه وسلم قال لأصحابه : (( أتدرون أربى الربا عند الله ؟ قالوا : الله ورسوله أعلم قال : فإن أربى الربا عند الله استحلال عرض امرئ مسلم , ثم قرأ رسول الله صلى الله عليه وسلم  » والذين يؤذون المؤمنين والمؤمنات بغير ما اكتسبوا فقد احتملوا بهتاناً وإثماً مبينا

Le messager d’Allah ﷺ a dit à ses compagnons : « savez-vous quelle est l’usure la plus élevée auprès d’Allah ? » Ils dirent : « Allah et son messager sont plus savants ». Il dit : « l’usure la plus élevée auprès d’Allah est de se rendre licite l’honneur d’un musulman ». Ensuite, il lut : « Ceux qui nuisent aux croyants et aux croyantes sans raison portent sur eux une calomnie et un péché évident ».

De même :

عن أنس بن مالك قال قال رسول الله صلى الله عليه وسلم لما عرج بي مررت بقوم لهم أظفار من نحاس يخمشون وجوههم وصدورهم فقلت من هؤلاء يا جبريل قال هؤلاء الذين يأكلون لحوم الناس ويقعون في أعراضهم

Selon Anas, le messager d’Allah ﷺ a dit : « quand on m’a fait faire le mi’raj, je suis passé devant des gens ayant des ongles en cuivre se griffant le visage ainsi que la poitrine. Je dis alors : « qui sont ceux-là, O jibril ? » Il dit : « ce sont ceux qui mangeaient la chaire des gens et ont porté atteinte à leur honneur »

Sache donc que parmi ceux qui calomniaient les karkaris, Allah les a montrés à certains fuqara à l’état d’éveil, dans le dhikr, et leur état en enfer était exactement comme le plus véridique des véridiques ﷺ a décrit ceux qui portent atteinte aux croyants sans raison valable. Prends donc garde à toi !

عن أبي الدرداء رضي الله عنه عن النبي صلى الله عليه وسلم قال : { من ذكر امرأ بشيء ليس فيه ليعيبه به حبسه الله في نار جهنم حتى يأتي بنفاذ ما قال فيه

Selon Abu Darda’, le prophète ﷺ a dit : « celui qui mentionne un homme par une chose qui n’est pas vraie pour le dénigrer par cela, Allah le retiendra prisonnier en enfer jusqu’à ce qu’il expie ce qu’il a dit »

O Ben Aissa, prends donc garde à toi, ton Seigneur a dit :

وَيْلٌ لِّكُلِّ هُمَزَةٍ لُّمَزَةٍ

« Wayl pour tout médisant calomniateur ! »

Or, Wayl n’est rien d’autre qu’une vallée de l’enfer où coule un fleuve dont les eaux ne sont que du pus et du vomi des gens du malheur. Or, ne vas-tu donc pas te repentir avant qu’Allah ne te réserve ce sort ?

Réfléchis donc, aux paroles que tu as proférées et qui sont consignées dans ton livre jusqu’à la résurrection, qu’importe si tu as retiré la vidéo où tu les prononces. Si tu prétends qu’elles sont vraies, nous te demandons de ramener ta preuve. Or, nous savons que tu ne le pourras jamais, jusqu’à l’extinction du soleil. Et si tu ne le fais pas, tu n’auras point d’excuse devant Allah s’Il te destine à ce châtiment.

Quant à nous, nous disons et jurons par Allah en dehors duquel il n’y a point de dieu, que cette muraqa’ah est loin de coûter le prix que tu as affirmé, O calomniateur. Et si ton savoir dépasse dans le fiqh le chapitre de la prière, tu sauras donc que je t’ai précédé dans l‘apport de la preuve alors que rien ne m’y obligeait, conformément au hadith :

البينة على المدعي واليمين على من أنكر

La preuve incombe à celui qui prétend et le serment à celui qui nie.