بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين

Assise du Shaykh Educateur Sidi Mohamed Faouzi al-Karkari –radiAllâhu ‘anhu-
Cours du Samedi 8 Mars 2014

Hadîth al-nouzoul, Asrâr de l’Ism, le Sheykh (Wassita), lâ prohibitif

Cet article est une tentative de retranscription de ce que le faqir faible et incapable a pu entendre de la bouche du Sheykh, sayidunâ Muhammad Fawziy al-Karkariy (quddissa sirruhu), selon les limites de la compréhension du mourid ainsi que son incapacité à retranscrire en français la réalité spirituelle profonde de cette intervention réalisée en arabe.

Allâh étant l’être à qui rien ne ressemble, de même il n’est rien qui ressemble à Son Nom, qui ne se sépare jamais du Nommé, contrairement à la créature, limitée dans le temps et l’espace. Lorsqu’on évoque donc le Nom d’Allâh, il faut réaliser le fait qu’Il est avec nous par Ses Attributs (sifat), par Ses Lois (ahkâm), par Ses Faits (af’âl) et par Son Essence (dhât). Et lorsqu’on parle de croire, immédiatement on fait référence à la foi, al-Imân, qui consiste en croire en Allâh, aux anges, aux Livres révélés, aux Messagers, au Jour du Jugement, ainsi qu’au destin soit-il bon ou mauvais… l’Imân consiste donc en le fait de croire en ce qui est inconnu (ghayb). Considérons donc le premier pilier de l’Imân, qui est le fait de croire en Allâh… afin de parvenir à cette réalité profonde, on s’en remet à la lecture du Nom divin, qui commence par celle de la lettre ha. Il s’agit de la porte d’entrée vers la Connaissance Suprême, que les gens d’Allâh nomment également « ‘aïn ul-Ism », cette lettre ha s’écrit sous la forme d’un cercle et l’accès au Secret de la Connaissance divine permet au mourid Karkariy, après avoir réalisé la retraite spirituelle de trois jours, de comprendre et réaliser que la création toute entière se trouve réunie dans ce cercle, le zéro du fana’.

Dans un Hadîth très connu rapporté par sayidina Abou Hourayra (radiAllâhu ‘anhu), le Messager d’Allâh (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) a dit: « Notre Seigneur, exalté soit-Il, descend (yanzilou) durant le dernier tiers de chaque nuit au ciel de ce bas monde et dit alors: « Qui M’invoque afin que Je l’exauce? Qui Me demande afin que Je lui donne? Qui implore Mon pardon afin que Je le lui accorde? » [Hadîth rapporté par l’Imâm Ahmad, al-Boukhâriy, Muslim et d’autres].

… il conviendra d’abord et avant toute chose, afin d’éviter de tomber dans le piège de la polémique et des débats futiles que suscite ce Hadith au sein de la communauté, de souligner le fait que le Nom divin mentionné ici est le Nom « al-Rabb », et que si effectivement il ne convient pas de dire que « Allâh » descend (yanzil), ce n’est pas ici de l’Ism al-Moufrad dont il s’agit… mais encore faut-il savoir qui est « Allâh », et qui est « al-Rabb », selon la compréhension de Tawhid ul-Jam’ (l’Unicité de la réunion) puis selon celle du Tawhid ul-Farq (l’Unicité différenciée), et ceci n’est pas une Connaissance qui s’acquiert au travers de l’étude de livres, mais plutôt en pratiquant le dhikr en retirement spirituel, et en privilégiant pour s’y adonner justement le dernier tiers de la nuit.

Au lieu donc de dormir, le serviteur sincère ne manque pas de se lever dans le dernier tiers de la nuit et de se consacrer au dhikr, afin de ne pas manquer la descente de son Seigneur, une descente (nouzoul) qui sied bien entendu au Nom divin al-Rabb, exempt de toute limite spacio-temporelle. Au travers du dhikr, le serviteur parvient petit à petit à se débarrasser du temps et de l’espace, et c’est seulement une fois fait qu’il peut percevoir la parole transmise dans ce Hadîth: « hal min moustaghfir = Y a t-il quelqu’un qui demande Mon pardon? »… en revanche, tant que le serviteur demeure dominé par ses passions et ses préoccupations mondaines, il ne peut se défaire des limites du temps et de l’espace et n’a donc qu’une part superficielle dans la compréhension de ce noble Hadîth. Le meilleur des dhikr, selon les Hadîth connus, est le dhikr de « lâ ilâha illa Allâh », et ce dhikr commence par le mot « lâ ». Nous avions vu précédemment comment ce « lâ », appelé lâ ul-nafiy (le lâ prohibitif), était constitué en réalité de deux lettres lam.

lam

Nous ajoutons aujourd’hui que ces deux lam sont en réalité deux lam ul-qabd, qui correspondent, lorsqu’on découpe la Lecture de l’Ism al-Moufrad « Allâh », à deux lam identiques du mot « lahu », auquel goûte le mourid dans notre noble Tariqa après avoir goûté à la Réalité profonde de « huwa »…

Cette Réalité spirituelle de « huwa » consiste en la réalisation de la réunion de l’ensemble des Noms divins au sein de la lettre hâ de l’Ism al-Moufrad, ce qui explique pourquoi la récitation connue des 99 Noms ne se réalise qu’après la mention du Nom « huwa »: « yâ man huwa Allâhu lladhi lâ ilâha illâ huwa, al-Rahmân al-Rahîm al-Malik al-Qouddoûs al-Salâm… » C’est donc après avoir accédé à cette Réalité profonde que le mourid, au fur et à mesure de ses efforts, est hissé par la grâce de son Sheykh vers une Réalité plus vaste encore… Dès lors il ne considère plus simplement ce monde comme néant, voyant l’Unicité divine en chaque chose, mais il se voit initier à ce que l’on appelle le Tawhid ul-Farq, qui permet de différencier ce qui constitue l’Unicité… ceci parce que, comme nous l’avons dit précédemment, les Noms ont beau être tous réunis dans le hâ, ils n’en sont pas pour autant égaux les uns aux autres, et certains sont même opposés les uns des autres. Ainsi le Nom al-Rabb a ses particularités que ne partage pas forcément un autre Nom… Le mourid voit donc s’ajouter au ha réunissant l’ensemble de ce qu’il considère être l’Existence, et en dehors duquel son entendement ne peut concevoir qu’il y ait une Existence… une deuxième lettre : un lam appelé lam ul-qabd (le lam de l’oppression) et qui, ajouté au ha de l’Ism al-Moufrad, le hisse au degré spirituel de l’Espoir (maqâm ul-Rajâ’) et l’initie à la Réalité profonde de « lahu »:

« alladhiy lahu mulku s-samâwâti wa l-ardi wa mâ baynahumâ= Celui à qui appartient la souveraineté des cieux et de la terre et de ce qui se trouve entre eux » [s43.v85]Ce degré spirituel est appelé maqâm de l’Espoir de par le fait qu’il permet d’établir une relation particulière entre le serviteur et son Seigneur, après que celle-ci ait été en quelque sorte impersonnelle et que le mourid, ivre de huwa, n’ait plus conçu sa propre existence qu’au travers de la Sienne, ne voyant plus que huwa.« Où que vous vous tourniez, la Face (wajh) d’Allah est là » [s2.v115].

Pour en revenir donc au lâ prohibitif… nous disions que ce lâ est constitué de deux lam identiques, deux lam ul-qabd issus de « lahu ». « lahu mulku s-samâwâti wa l-ardi wa mâ baynahumâ = à Lui appartient la souveraineté des cieux et de la terre et de ce qui se trouve entre eux », ce qui signifie que la réunion de ces deux lam est la réunion des cieux et de la terre… mais contrairement au ha de l’Ism al-Moufrad, qui lui aussi réunit l’ensemble de la création, le lâ prohibitif est ouvert dans sa partie supérieure, indiquant sa particularité d’être absolu et illimité, de même qu’il est impossible de donner une limite aux cieux… Les deux lam se croisent en un point situé au centre de la représentation du lâ prohibitif, et ce point central (markaz) n’est autre que la wassita, l’intermédiaire entre le serviteur et son Seigneur, le point de Sayidinâ ‘Aliy (karram Allâhu wajhah), la porte de la Ville de la Science par laquelle on accède au premier lam de l’Ism al-Moufrad appelé “lam ul-ma’rifa = le lam de la Connaissance” et qui, s’ajoutant à « lahu », initie le mourid à la Réalité profonde de « lillâh »: « Innâ lillâhiwa innâ ilayhi râji’oûn = Certes nous sommes à Allah, et c’est à Lui que nous retournerons. » [s2.v156]. A ce moment là se réalise pour le cheminant la parole d’Allâh subhânahu wa ta’âlâ: « Ô toi, âme apaisée, retourne vers ton Seigneur, satisfaite et agréée » [s89.v27/28].

La toute première étape que franchit le soufi au cours de son cheminement est la prise de la bay’a… puis il commence à pratiquer le dhikr, et le tout premier mot constituant le meilleur des dhikr est le lâ prohibitif, constitué de deux lam ul-qabd (lam de l’oppression)… on parle ici d’oppression (intérieure) tout simplement parce que ce lam est en rapport direct avec ce que l’on appelle la wassita, c’est à dire l’intermédiaire entre le serviteur et son Seigneur… et la nafs n’accepte pas la présence de cet intermédiaire, elle voudrait recevoir directement de la part d’Allâh… or ceci n’a pas de sens, et nous sommes contraints et forcés de prendre des intermédiaire dans chacune des étapes d’apprentissages de notre vie. L’enfant apprend tout d’abord à s’exprimer par l’intermédiaire de sa mère, puis son père lui enseigne les bases de sa religion, puis l’instituteur lui apprend à lire et à écrire… et s’il poursuit jusqu’au doctorat il puise toujours ses connaissances par l’intermédiaire de professeurs et d’experts, d’une manière ou d’une autre… il n’y a pas de révélation divine qui descend pour lui enseigner ce qu’il doit savoir, que ce soit en matière profane comme religieuse, et ne prétendra le contraire qu’une personne se considérant du maqâm de sayidinâ ‘Issâ (‘alayhi s-salâm).
La wassita n’est pas Allâh, mais plutôt le guide sans lequel il n’est pas possible d’arriver au But.

Et sayidunâ ‘AbdesSalâm ibn Machîch dit en ce sens: « Et s’il n’y avait pas eu de Wassita, comme ce fut dit, il n’y aurait pas eu non plus de cheminant (mawssoût) ».

Et nous soulignons ici “comme ce fut dit”, qui nous montre que l’auteur de cette parole s’innocente du fait de s’octroyer à lui-même un enseignement, le rendant ainsi à celui de qui il le détient, qui lui même le détenait d’une autre Wassita, et ainsi de suite jusqu’à la Wassita Suprême: le Messager d’Allâh (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam).


En italique se trouvent des ajouts, précisions et explications selon la compréhension limitée du faqir Suhayl